Dans un contexte de guerre d’agression rwandaise et de crises multiformes, une initiative inédite émerge du paysage politique congolais. Trente communicateurs des partis de la majorité comme de l’opposition ont paraphé ce jeudi 12 juin 2025 un code de bonne conduite historique, fruit d’un processus de renforcement des capacités orchestré par la Dynamique des politologues de la RDC (DYPOL). Cet engagement solennel, soutenu techniquement par la MONUSCO et le Centre d’études pour l’action sociale (CEPAS), pourrait-il marquer un tournant décisif dans la qualité du débat public au Congo?
Ce document structuré en dix articles engage ses signataires à transformer radicalement leur pratique professionnelle. Les porte-paroles s’astreignent désormais à privilégier des discours axés sur les valeurs de leurs formations plutôt que de servir de caisse de résonance à la désinformation. Une exigence d’autant plus cruciale que, comme l’a souligné Habibou Bangré de la division politique de la MONUSCO, “les mots ont parfois un pouvoir aussi puissant que celui des armes”. Cette reconnaissance du poids des discours dans la préservation de la cohésion sociale et nationale n’est-elle pas l’aveu implicite des dérives passées?
Christian Moleka, président de DYPOL, présente ce code comme la “feuille de route” incontournable pour les communicants politiques. “Nous avons accompagné 27 partis politiques depuis le 14 mai sur la communication constructive”, a-t-il expliqué, précisant que cet outil vise à “réduire le recours à la désinformation voire même à la manipulation de l’information”. L’analyste politique insiste sur l’urgence de créer des repères clairs pour un débat public sain, sans discrimination et attentif à la cohésion nationale. Mais comment garantir que ces belles résistances survivront aux prochaines joutes électorales?
La phase de signature n’est que le prélude d’un processus plus ambitieux. Moleka annonce déjà la prochaine étape: “vulgariser le code pour que tous les praticiens de la communication politique adhèrent à la démarche”. Cette diffusion ciblera non seulement les hiérarchies partisanes mais aussi, audacieusement, la population congolaise dans son ensemble. Une approche holistique qui reconnaît que l’assainissement du discours politique dépasse le seul cadre des porte-paroles officiels.
L’initiative reçoit l’onction institutionnelle de Kasombo Philippe, Directeur aux affaires juridiques du Secrétariat Général aux relations avec les partis politiques. Saluant une démarche “combien significative”, il espère voir disparaître les “communications qui sont à la base des troubles, des divisions, de démoralisation de la population”. Son plaidoyer pour la moralité politique résonne comme un constat accablant des pratiques antérieures. Les articles du code, dont l’obligation de prioriser les thématiques répondant aux aspirations populaires et la promotion d’échanges centrés sur les idées plutôt que sur les individus, constitueront-ils un rempart suffisant contre les vieux démons?
Cette tentative d’instaurer un code conduite des communicants politiques en RDC représente un pari fragile mais nécessaire. Alors que le pays traverse une période de tensions exacerbées, la capacité des acteurs à transformer leurs engagements écrits en pratiques quotidiennes sera scrutée à la loupe. La vulgarisation promise par DYPOL, MONUSCO et CEPAS déterminera si cette feuille de route deviendra un véritable référentiel ou restera un vœu pieux dans les tiroirs. L’enjeu dépasse la simple éthique professionnelle : il touche à la préservation même du tissu social congolais.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd