Le ministre d’État chargé de la Justice, Constant Mutamba, a formellement exigé la récusation du procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, ainsi que de l’ensemble des magistrats relevant de son autorité. Cette démarche exceptionnelle, consignée dans une correspondance officielle, se fonde sur l’allégation d’une « inimitié manifeste » à caractère personnel et politique. Le ministre soutient que cette hostilité procède de l’ouverture d’une instruction judiciaire le visant personnellement suite à des révélations concernant ses avoirs à l’étranger, qualifiant cette procédure d’« acharnement » et de « complot politique » destiné à son éviction.
Parallèlement, le procureur général Firmin Mvonde a transmis à l’Assemblée nationale un réquisitoire supplétif sollicitant l’autorisation de poursuivre Constant Mutamba pour détournement de fonds publics. Les investigations du parquet général estiment à près de 19 millions de dollars les sommes indûment versées à la société Zion Construction dans le cadre d’un contrat de construction d’un établissement pénitentiaire à Kisangani. Selon les éléments du dossier, les auditions du ministre n’auraient pas dissipé les soupçons de malversation, mais au contraire consolidé les présomptions de fraude.
Le président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, a instamment sommé les groupes parlementaires de désigner leurs représentants au sein d’une commission spéciale constituée pour examiner la demande d’autorisation de poursuites. Cette affaire Zion Construction, qui implique des détournements de fonds publics en RDC, revêt une dimension politique accentuée par la concomitance d’une seconde affaire mettant en cause le ministre Mutamba. Ce dernier est également soupçonné d’avoir participé à des détournements au sein du Fonds de réparation pour les victimes des activités illicites de l’Ouganda (FRIVAO).
Les enquêteurs du parquet général ont identifié des irrégularités substantielles dans l’attribution du marché à Zion Construction. Il est reproché à Constant Mutamba d’avoir omis de vérifier l’existence légale de l’entreprise ainsi que la réalité et la qualité des prestations exécutées. Le ministère public considère que cette structure aurait servi d’écran à une opération de blanchiment et de détournement de deniers publics, la qualifiant d’entité fictive dans ses conclusions préliminaires.
La procédure de récusation engagée par le ministre contre le procureur général introduit une tension institutionnelle inédite, soulevant des interrogations sur l’indépendance de la chaîne pénale. Cette affaire marque-t-elle un nouveau chapitre dans les luttes d’influence au sein des hautes sphères de l’État congolais ? La suite dépendra désormais de la décision de l’Assemblée nationale concernant le réquisitoire, tandis que la demande de récusation devrait faire l’objet d’un examen collégial par les instances disciplinaires judiciaires compétentes.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
