Dans un mémorandum présenté ce mardi 10 juin à Kolwezi, les gouverneurs des provinces de RDC ont dressé un constat accablant : l’immobilisme gouvernemental a réduit à néant la plupart des recommandations issues des précédentes conférences des gouverneurs. Cette XIIe édition, tenue au cœur du Lualaba, s’ouvre ainsi sur un aveu d’échec systémique qui interroge la volonté réelle de Kinshasa d’appliquer la décentralisation.
Jacques Kyabula, gouverneur du Haut-Katanga et porte-voix du collectif, a pointé deux échecs symboliques : « La non-opérationnalisation de la Caisse nationale de péréquation, pourtant vitale pour corriger les inégalités provinciales » et « l’usage détourné des motions parlementaires transformant les assemblées provinciales en machines à crises ». Ces blocages sapent l’axe stratégique 533 du gouvernement, censé garantir l’autonomie financière des entités décentralisées. Les gouverneurs rappellent-ils à bon escient que la paralysie institutionnelle sert certains intérêts centraux ?
Le vice-doyen des gouverneurs a également dénoncé une double carence : le non-paiement chronique des émoluments des députés provinciaux et la « persistance alarmante du VIH pédiatrique en RDC ». Si Kyabula salue les efforts présidentiels pour la couverture santé universelle, il souligne l’urgence d’une intervention coordonnée face à ce fléau sanitaire. La question se pose : pourquoi des recommandations aussi cruciales pour la survie des provinces restent-elles dans les tiroirs de la capitale ?
Dans son allocution, Fifi Masuka, gouverneure du Lualaba, a enfoncé le clou sanitaire : « Moderniser les infrastructures de santé et déployer du personnel qualifié n’est plus une option mais une obligation pour protéger femmes, enfants et populations rurales ». Citant l’ancien secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon, elle a plaidé pour des « politiques bien pensées » afin de bâtir des « provinces prospères et résilientes ». Son appel à l’action résonne comme un reproche voilé à l’approche fragmentaire du pouvoir central.
Cette conférence des gouverneurs révèle ainsi des fractures béantes entre Kinshasa et les provinces. L’accumulation de recommandations ignorées – de la réforme financière à l’urgence sanitaire – dessine un fédéralisme de façade. Les gouverneurs parviendront-ils à transformer cette tribune en levier d’action concret ? L’enjeu dépasse Kolwezi : il touche à la crédibilité même de la décentralisation congolaise, minée par des années de promesses non tenues. La balle est désormais dans le camp du gouvernement, dont la réactivité sera scrutée à l’aune de ces doléances répétées.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net