Le cœur minier de la RDC a pulsé au rythme d’une révolution silencieuse. À Lubumbashi, épicentre du Haut-Katanga, les organisations de la société civile africaine ont scellé ce 10 mai 2025 une alliance historique : la Coalition Africaine sur les Minerais Verts. Neuf nations – RDC, Mali, Madagascar, Zambie, Zimbabwe, Afrique du Sud, Guinée-Conakry, Cameroun, Ghana – unissent leurs forces face à un paradoxe brutal. Comment extraire le cobalt, cuivre et lithium indispensables à la transition énergétique sans sacrifier les forêts, les sols et les communautés ?
« Notre coalition est le cri d’alarme d’un continent asphyxié par l’exploitation minière traditionnelle », lance Jean-Pierre Okenda, figure emblématique de ce mouvement continental. Les minerais verts, ces métaux stratégiques pour batteries et énergies renouvelables, drainent déjà vers l’Afrique des investissements colossaux. Mais à quel prix ? Les forêts congolaises saignent sous les coupes sauvages. Les rivières zambiennes étouffent sous les rejets toxiques. Les villages malgaches tremblent devant l’accaparement des terres.
La mission est claire : imposer une production minière juste et équitable. Pas question de reproduire les erreurs du siècle passé où l’Afrique exportait ses richesses brutes sans bénéfices locaux. « L’extractivisme aveugle a creusé des cratères dans nos écosystèmes et dans notre tissu social », dénonce Okenda. La coalition exige désormais que chaque tonne de minerai extraite respecte trois piliers : zéro pollution, partage équitable des revenus, consentement éclairé des populations.
L’urgence est vitale. Alors que la demande mondiale de cuivre devrait bondir de 300% d’ici 2040, le Lubumbashi environnement al se trouve en première ligne. Cette ville-capitale du cuivre voit déjà ses nappes phréatiques contaminées par l’acidification des sols. La nouvelle coalition entend faire des provinces minières africaines des laboratoires de justice climatique. Comment ? En négociant des clauses contraignantes avec les multinationales, en formant des observateurs locaux, en cartographiant les zones écologiques sensibles.
Le combat dépasse la simple régulation. Il s’agit de réorienter la transition énergétique Afrique vers une véritable souveraineté industrielle. « Pourquoi l’Afrique exporterait-elle du cobalt brut pour importer des batteries chères ? », interroge un délégué malien. La coalition plaide pour des usines de transformation locales, créatrices d’emplois durables. Une vision qui prend racine depuis 2023, matérialisée par un comité pilote en 2024, et qui explose aujourd’hui en actions coordonnées.
Au cœur de ce bouclier vert : la défense des droits communautés minières. Les témoignages affluent sur les déplacements forcés, les cultures anéanties, les promesses non tenues. « On nous parle de transition juste, mais dans nos villages, c’est toujours la loi du plus fort », proteste une militante zimbabwéenne. La réponse ? Des brigades juridiques mobiles, un fonds d’indemnisation transparent, et l’intégration systématique des chefs traditionnels dans les négociations.
Le défi est titanesque. Comment concilier urgence climatique et justice sociale ? La coalition africaine minerais verts mise sur l’effet de levier continental. En mutualisant leurs expertises, ces neuf pays pèsent 80% des réserves africaines de métaux critiques. Une force de frappe inédite pour réécrire les règles du jeu minier. Leur arme : des audits environnementaux indépendants, des labels de traçabilité exigeants, et une diplomatie agressive dans les forums internationaux.
L’Afrique refuse désormais d’être le sous-sol martyr de la planète. Cette coalition sonne le glas d’une époque où l’on sacrifiait l’environnement et les droits humains sur l’autel du profit immédiat. À Lubumbashi, berceau de ce sursaut historique, un message clair a résonné : pas de transition énergétique sans révolution éthique. L’heure n’est plus aux discours, mais à l’action concrète. Le continent veillera désormais à ce que chaque gramme de minerai vert extrait soit aussi un gramme de justice rendue.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: Actualite.cd