Dans un coup de tonnerre diplomatique, le gouvernement rwandais a annoncé lundi son retrait officiel de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC). Cette décision radicale, prise lors d’un Conseil des ministres présidé par le Premier ministre Edouard Ngirente, vise directement la République démocratique du Congo, accusée de “manipuler” l’organisation à des fins hostiles.
Le communiqué gouvernemental rwandais est sans équivoque : “Il est inacceptable que des États membres, dont la RDC, manipulent la CEEAC contre un autre État membre”. Kigali reproche à Kinshasa, en sa qualité de présidente sortante de l’organisation, d’avoir “violé les règles de l’organisation pour comploter injustement contre le Rwanda”. Une accusation d’autant plus grave qu’elle persisterait sous la présidence actuelle, selon les autorités rwandaises.
Les griefs de Kigali s’étendent au soutien congolais présumé aux Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), qualifiées de “milices génocidaires”. Le Rwanda estime que cette position contrevient frontalement à la résolution 2773 du Conseil de sécurité de l’ONU, constituant selon lui une entorse flagrante aux principes de légalité et de multilatéralisme. Comment la communauté internationale peut-elle tolérer un tel paradoxe où un État membre soutiendrait des groupes armés condamnés par les Nations unies ?
Le document officiel évoque également des incidents frontaliers préoccupants : des “tirs transfrontaliers” et des “incursions” attribuées aux forces congolaises et aux FDLR sur le territoire rwandais. Ces allégations s’accompagnent de la dénonciation de “menaces publiques” proférées par le président congolais Félix Tshisekedi, ce qui représenterait, toujours selon Kigali, une violation manifeste du traité fondateur de la CEEAC.
Face à cette crise diplomatique sans précédent, le Rwanda exhorte la RDC à se concentrer sur “ses faiblesses internes” plutôt que de “blâmer des parties extérieures” dans les arènes internationales. Cette sortie cinglante interroge sur l’avenir des mécanismes de coopération régionale en Afrique centrale, déjà fragilisés par des tensions récurrentes. Le retrait rwandais de la CEEAC ne risque-t-il pas d’accentuer la fragmentation d’une région cruciale pour la stabilité du continent ?
Malgré cette rupture, Kigali affirme maintenir son engagement dans d’autres initiatives de paix, notamment celles pilotées par l’Union africaine, les États-Unis et le Qatar. Cette position nuance révèle une stratégie diplomatique complexe où le Rwanda privilégierait désormais des médiations extra-régionales. Quelle sera la réaction des autres membres de la CEEAC face à ce séisme géopolitique ?
Les implications de ce retrait pour la sécurité régionale sont profondes. La CEEAC, créée en 1983 pour promouvoir l’intégration économique, se retrouve plongée dans une crise existentielle tandis que le conflit latent entre la RDC et le Rwanda entre dans une phase nouvelle et dangereuse. L’avenir des relations bilatérales semble plus incertain que jamais, avec des accusations croisées qui rappellent douloureusement les pages les plus sombres de l’histoire des Grands Lacs.
Alors que la région affronte déjà des défis sécuritaires majeurs, cette décision du Rwanda pourrait rebattre les cartes des alliances diplomatiques en Afrique centrale. La balle est désormais dans le camp des autres États membres et des instances continentales, appelés à jouer un rôle crucial pour prévenir une escalade aux conséquences imprévisibles.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd