Le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde, a sollicité ce lundi 9 juin l’autorisation de l’Assemblée nationale pour initier des poursuites judiciaires à l’encontre de Constant Mutamba, ministre de la Justice. Ce dernier est accusé de détournement de fonds publics initialement destinés à l’indemnisation des victimes du conflit armé communément appelé « guerre des six jours » à Kisangani.
Lors de la séance plénière, le réquisitoire du magistrat suprême, présenté par le rapporteur de la chambre, a formellement retenu le chef de « détournement de fonds publics » contre le ministre en exercice. Comment les explications fournies par l’accusé ont-elles pu renforcer les suspicions du parquet ? Selon les déclarations de Firmin Mvonde, les justifications avancées par Constant Mutamba lors de ses auditions n’ont nullement dissipé les doutes, mais ont au contraire consolidé la conviction des enquêteurs quant à une intention manifeste de soustraire des deniers publics.
L’enquête pré-juridictionnelle a particulièrement ciblé le rôle de la société Zion Construction, présentée comme bénéficiaire central des fonds litigieux. Le réquisitoire souligne avec insistance que le ministre Mutamba n’a procédé à aucune vérification concernant l’existence légale de cette entreprise, pas plus qu’il n’a supervisé les ouvrages supposément réalisés ou contrôlé la qualification de son personnel. « Force est de constater que la société Zion Construction constitue une simple façade, établie dans l’unique dessein de détourner les fonds publics alloués à la réparation des préjudices causés par les activités illicites de l’Ouganda en RDC », stipule le document accusatoire.
Les investigations ont révélé que les associés présumés de cette structure demeurent introuvables, faisant désormais l’objet d’avis de recherche émis par les autorités judiciaires. Par ailleurs, les missions d’enquête déployées à Kisangani n’ont permis d’identifier aucun terrain destiné à la construction de la maison carcérale prévue, alors que des financements substantiels y étaient affectés. Lors de son audition, le ministre aurait affirmé que le site restait à identifier, tout en concédant ne l’avoir jamais visité ni même connaître sa localisation précise.
La procédure a connu un nouveau développement significatif lorsque Constant Mutamba, convoqué pour la troisième fois ce lundi 9 juin, s’est abstenu de comparaître personnellement au parquet général, choisissant de se faire représenter par son conseil juridique. Une ultime convocation est notifiée pour jeudi prochain. À défaut de présentation spontanée, un mandat d’amener pourrait être délivré, dans l’attente de la décision de l’Assemblée nationale concernant la levée de l’immunité parlementaire.
Cette affaire s’inscrit dans un contentieux judiciaire plus large, le procureur Mvonde ayant déjà obtenu une autorisation législative pour instruire une précédente affaire de détournement présumé de 19 millions de dollars. Ces fonds étaient initialement affectés à la construction d’une prison à Kisangani. Les auditions prolongées du ministre auraient mis en lumière plusieurs anomalies substantielles, venant consolider les charges retenues à son encontre. Quelles conséquences cette accumulation de dossiers pourrait-elle avoir sur le processus d’indemnisation des victimes historiques de Kisangani ? La procédure en cours déterminera si les fonds destinés aux réparations des crimes de la guerre des six jours ont effectivement fait l’objet de détournements systémiques.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net