Kpandroma, terre de deuil et d’espoir. Vendredi 6 juin, sous le poids d’une cérémonie funéraire, des milliers de Lendu, Hema, Ndo et Mabendi ont entendu retentir un appel historique. Joel Mande, chef coutumier Lendu, s’est dressé face aux siens et aux miliciens de la CODECO présents : « Il est temps que le peuple Lendu prenne ses responsabilités et montre sa grandeur par le travail, non par les violences. »
Dans ce village à 100 km au nord de Bunia, l’hommage à un ancien chef s’est mué en tribune pour la paix. Mande a dénoncé sans détour les ravages de huit années de conflit : « Assassinats, pillages, déplacements massifs… Nos écoles sont fermées, nos marchés désertés. » Sa voix portait l’urgence d’une communauté à bout de souffle.
Le chef coutumier a lancé une mise en garde cinglante contre la CODECO : « Ce groupe est une épine aux pieds des Lendu. Il doit cesser ses actes destructeurs qui nous nuisent à nous-mêmes. » Un désaveu public rare dans une région où les armes parlent souvent plus fort que la raison.
Face aux représentants Hema venus en signe d’apaisement, Mande a brisé un tabou : « Les Hema ne sont pas nos ennemis. » Comment ne pas voir dans cette déclaration un pas vers la réconciliation tant attendue entre ces communautés déchirées ? L’appel à « rechercher la paix avec nos voisins » résonne comme un défi aux vieux démons de l’Ituri.
L’analyse des observateurs est unanime : ce discours à Kpandroma marque un tournant. Le chef a lié paix et développement, exhortant la jeunesse à « se distinguer par l’éducation et la production agricole ». Un message fort alors que 1,7 million de déplacés survivent dans la province selon l’ONU.
Mais au-delà des mots, que pèsera cet appel face aux kalachnikovs ? Joel Mande en appelle au gouvernement provincial et à Kinshasa : « Soutenons les efforts pour restaurer la paix. » La balle est désormais dans le camp des autorités… et dans celui des miliciens. Les funérailles de Kpandroma auront-elles enterré la haine ou simplement pleuré une paix toujours différée ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net