Dans un coup de théâtre diplomatique, le Rwanda a officiellement annoncé son retrait de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) ce samedi, à l’issue du 26e sommet ordinaire tenu à Malabo. Kigali accuse sans détour la République démocratique du Congo d’avoir instrumentalisé l’organisation régionale avec l’appui de certains États membres, plongeant l’institution dans une crise sans précédent.
Le communiqué rwandais pointe un grief central : la violation de l’article 6 du traité constitutif garantissant la présidence rotative. « Notre droit légitime a été délibérément ignoré pour imposer le diktat de la RDC », affirme le gouvernement, dénonçant des dérives systémiques au sein de la CEEAC. Cette décision radicale s’inscrit dans une escalade de tensions, rappelant que Kigali avait déjà protesté en mars 2023 contre son exclusion du sommet de Kinshasa sous présidence congolaise.
L’épicentre de la crise réside dans le blocage, par la RDC, de la passation de présidence entre la Guinée équatoriale et le Rwanda. Malgré deux réunions à huis clos orchestrées par Malabo pour désamorcer la bombe diplomatique, les négociations ont échoué. Une source bien informée révèle que Kinshasa brandissait également la menace d’un retrait en cas d’échec de ses revendications, illustrant la polarisation croissante au sein de l’espace communautaire.
Ce retrait Rwanda CEEAC survient dans un contexte régional explosif. L’organisation a multiplié les condamnations contre le M23, qualifiant ses offensives au Nord-Kivu d’actes illégaux et exigeant en février dernier le « retrait immédiat » des forces rwandaises du territoire congolais. Kigali perçoit-il ces résolutions comme un alignement de la CEEAC sur les positions congolaises ? La question plane lourdement sur cette rupture.
Les implications stratégiques sont immédiates. Alors qu’un sommet conjoint SADC-CAE s’ouvre ce 8 juin à Dar es Salaam pour relancer le processus de paix dans l’Est de la RDC, cette défection fragilise l’architecture sécuritaire régionale. Les tensions diplomatiques Afrique centrale atteignent un paroxysme, risquant de paralyser les mécanismes de médiation face au conflit RDC Rwanda. Cette décision sonne-t-elle le glas des efforts de résolution multilatérale ?
L’analyse géopolitique suggère une redéfinition des alliances. Le sommet Malabo CEEAC, censé être un forum de coopération, a révélé des fractures irréconciliables. Les observateurs s’interrogent : le retrait rwandais annonce-t-il un réalignement vers d’autres blocs régionaux ou isole-t-il davantage Kigali ? La réponse se jouera dans les prochaines semaines, au cœur des provinces orientales congolaises où la crise sécuritaire alimente cette guerre froide diplomatique.
Alors que la région bascule dans l’inconnu, une certitude persiste : l’absence de dialogue constructif entre Kinshasa et Kigali continue de nourrir l’instabilité. Les populations du Nord-Kivu, prises en étau entre les rebellions et les rivalités étatiques, attendent désespérément que les capitales transforment leurs déclarations en actions concrètes pour la paix.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd