Kolwezi, cité minière du Lualaba, se pare de ses plus beaux atours pour accueillir du 10 au 13 juin la 12e Conférence des gouverneurs de la République démocratique du Congo. Cet événement stratégique, placé sous le patronage du président Félix Tshisekedi, réunira l’ensemble des chefs des exécutifs provinciaux dans un contexte où la vitrine de l’unité nationale semble plus cruciale que jamais. Derrière les préparatifs protocolaires, ne cherche-t-on pas à masquer les tensions interprovinciales par un unanimisme de façade ?
La visite présidentielle dépasse le simple cadre institutionnel. Tshisekedi profitera de son déplacement pour inaugurer plusieurs infrastructures phares achevées sous l’impulsion du gouvernement provincial dirigé par Fifi Masuka. Parmi les réalisations les plus symboliques figure l’aéroport international de Kolwezi, dont les travaux avancent à grands pas. Cette infrastructure aéroportuaire, promise comme catalyseur économique, incarne-t-elle véritablement la priorité des populations ou répond-elle à des considérations géopolitiques régionales ?
La métamorphose urbaine frappe tout observateur. Sous la férule des autorités locales, Kolwezi a subi une cure de jouvence sans précédent : réseaux routiers réhabilités, bâtiments administratifs rénovés, espaces publics assainis. « Je vis ici depuis plusieurs années, mais aujourd’hui Kolwezi est vraiment propre et ordonnée », confie Pauline Mbumb, commerçante, dans un élan de satisfaction populaire qui pourrait toutefois occulter les disparités sociales persistantes.
Le programme des inaugurations révèle l’ampleur des chantiers entrepris : direction provinciale des recettes modernisée, clinique Mwangeji rehaussée, siège de la CENI rénové, et surtout la nouvelle salle de spectacle polyvalente. « Cette salle, on en avait besoin depuis longtemps », s’enthousiasme Patrick Kaleng, étudiant, soulignant l’aspiration culturelle d’une jeunesse souvent marginalisée dans les projets de développement.
Cette opération de séduction urbaine s’inscrit dans une stratégie politique plus vaste. Les états-majors de l’Union sacrée multiplient les réunions de sensibilisation pour présenter un front uni entre pouvoir central et provinces. L’arrivée remarquée du gouverneur du Kasaï Oriental parmi les délégations avancées confirme l’enjeu de représentation. Mais cette harmonie affichée résistera-t-elle aux défis post-conférence, lorsque retombera le rideau de la mise en scène institutionnelle ?
La transformation urbaine de Kolwezi, si visible soit-elle, pose inévitablement la question de sa soutenabilité financière. Les infrastructures inaugurées représentent-elles un investissement durable ou un vernis temporaire ? Le président Tshisekedi, en validant ces réalisations provinciales, endosse implicitement un modèle de gouvernance décentralisée. Reste à savoir si cette reconnaissance se traduira par des transferts de compétences et de ressources pérennes, ou si elle demeurera un simple exercice de communication politique.
Alors que Kolwezi renforce son statut de carrefour économique et politique, cette conférence des gouverneurs pourrait marquer un tournant dans les relations Kinshasa-provinces. Le véritable test résidera dans la capacité à transformer l’essai : passer des inaugurations symboliques à la concrétisation des promesses de développement équitable. La façade rénovée de la ville saura-t-elle dissimuler indéfiniment les attentes non satisfaites des populations ? L’avenir du fédéralisme à la congolaise se joue peut-être dans ces artères redessinées.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
