Imaginez un internat autrefois bouillonnant de vie, où 300 jeunes filles venues de Kinshasa à Kisangani préparaient leur avenir. Aujourd’hui, les dortoirs du Lycée Kolikori de Fataki, en Ituri, ne résonnent plus que d’un silence pesant. Fermé depuis près d’une décennie à cause de l’insécurité, ce fleuron éducatif symbolise le drame de toute une région où la violence compromet l’éducation d’une génération.
Comment en est-on arrivé là ? Les racines de cette tragédie remontent à 1999, avec le déclenchement des conflits interethniques en Ituri. Sœur Denise Dioche, responsable des études et ancienne élève du lycée, se souvient avec émotion : « J’étais parmi les dernières internes évacuées lors des attaques. Les miliciens ont systématiquement vandalisé nos bâtiments coloniaux, héritage pourtant précieux ».
Après une brève accalmie permettant la réouverture en 2005, l’espoir a été de courte durée. Dès 2017, la recrudescence des activités de la milice CODECO a scellé le destin de l’internat. La dernière attaque en mars 2025 a été particulièrement dévastatrice : des combattants ont saccagé les dortoirs et la salle culturelle, réduisant en cendres des années d’efforts éducatifs. Ces violences répétées contre les écoles de l’Ituri posent une question cruciale : jusqu’à quand l’éducation restera-t-elle une variable d’ajustement dans les conflits armés ?
Les conséquences sont palpables. Autrefois réputé pour son excellence pédagogique et son cadre naturel enchanteur sur les collines de Fataki, l’établissement ne fonctionne plus qu’à 30% de sa capacité. « Les parents ont trop peur d’envoyer leurs filles ici », déplore Sœur Denise. Ce repli affecte particulièrement les jeunes venues de provinces éloignées, privées d’un accès à cette formation de qualité.
La fermeture de l’internat du Lycée Kolikori illustre un phénomène plus large d’insécurité éducation RDC, où des centaines d’écoles sont ciblées. Face à cette urgence, la sœur préfète lance un appel poignant : « La paix doit être restaurée sur tout le territoire de Djugu pour que nos enfants retrouvent le droit d’apprendre ». Elle insiste sur la nécessité d’une réhabilitation écoles Ituri en priorité, soulignant que sans infrastructures sécurisées, aucun développement éducatif n’est possible.
Alors que la région reste instable, cette situation interroge notre capacité collective à protéger les sanctuaires du savoir. La réhabilitation des écoles détruites par les attaques CODECO n’est pas qu’un enjeu matériel ; c’est un impératif pour reconstruire l’avenir de l’Ituri. Sans action décisive contre l’insécurité, combien d’autres établissements emblématiques sombreront dans le silence ?
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net