Dans la cité de Sake, au cœur du territoire de Masisi au Nord-Kivu, un geste concret a redonné espoir à des dizaines de femmes déplacées. Ce vendredi 30 mai, l’organisation AfriYan, soutenue par l’UNFPA, a remis des kits d’hygiène menstruelle essentiels à plus de 50 bénéficiaires retournées dans leurs communautés après des mois d’exode. Une initiative salvatrice alors que ces femmes vulnérables subissent de plein fouet les conséquences sanitaires de la crise humanitaire.
Chaque kit, soigneusement préparé, contient des serviettes hygiéniques, du savon, de l’Omo pour le lavage, un pagne traditionnel, une torche et des babouches. Mais au-delà des objets, c’est une bouée de sauvetage pour ces femmes qui, comme Chance Muhakabi, déplacée de Mweso et mère de deux enfants, devaient auparavant se contenter de « chiffons récupérés » pendant leurs règles. « Avant, je ne savais même pas utiliser un cotex ni en acheter », confie-t-elle, émue aux larmes.
Cette distribution s’inscrivait dans le cadre de la Journée internationale de l’hygiène menstruelle célébrée sous le thème « Un monde respectueux des règles ». Jovianne Tshanda d’AfriYan explique : « Nous avons organisé une séance de sensibilisation cruciale. La majorité de ces jeunes filles viennent des camps de déplacés de Mugunga et Kanyaruchinya autour de Goma. Briser les tabous est vital : les règles ne doivent pas être une honte mais un phénomène naturel respecté ».
Pourquoi cette action est-elle si urgente au Nord-Kivu ? Nathalie Muchinya, animatrice communautaire, alerte sur les risques sanitaires criants : « Le manque d’hygiène intime expose à des infections génitales chroniques. Sans eau propre ni latrines adéquates, la santé reproductive des femmes de Sake est en péril ». Une réalité d’autant plus préoccupante que l’UNFPA prévoit seulement 11 000 kits d’hygiène menstruelle pour toute la région en 2025 – une goutte d’eau face à l’océan des besoins.
L’urgence est systémique : dans les camps de déplacés, l’absence d’éducation menstruelle contribue directement aux grossesses précoces. Comme le souligne l’UNFPA, la crise humanitaire actuelle « porte atteinte à l’intimité et à la dignité » des femmes contraintes de fuir sans provisions essentielles. Les kits distribués à Sake représentent donc bien plus qu’un simple don : ils sont un rempart contre les infections et un outil d’autonomie.
Qu’en est-il de l’impact réel sur la santé reproductive au Congo ? Les bénéficiaires comme Chance l’attestent : « On nous a appris à gérer notre hygiène pendant les règles et à protéger notre environnement ». Une formation qui sauve des vies, car selon l’OMS, les infections uro-génitales non traitées peuvent entraîner des stérilités ou complications obstétricales. Dans une région où l’accès aux soins reste limité, la prévention par l’hygiène devient une stratégie vitale.
La route reste longue : avec plus de 2,3 millions de déplacés en RDC selon le HCR, dont une majorité de femmes, les besoins en kits hygiéniques dépassent largement les capacités actuelles. Pourtant, l’action d’AfriYan à Sake montre la voie : combiner distribution matérielle et éducation permet de briser le cycle infernal de la précarité menstruelle. Comme le résume Jovianne Tshanda : « Offrir une serviette hygiénique, c’est aussi offrir le droit à la dignité ».
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd