Dans la moiteur d’un samedi de fin mai, les engins de chantier ont rompu le silence des collines de Mont-Ngafula. Sous le regard attentif du ministre d’État en charge des Infrastructures, Alexis Gisaro, les premiers mètres de bitume ont commencé à recouvrir ce qui n’était hier qu’un chemin de terre. « Nous avons vu comment la nature a été transformée ici », s’est ému le ministre, pointant du doigt ce tronçon Sud-Ouest de la route des Rocades qui s’étire désormais comme un ruban noir vers les zones de Djokol, Ngombi et Kimvula. Cette scène historique marque-t-elle enfin l’ère des infrastructures Kinshasa tant attendue ?
Le projet phare de 74 kilomètres, conçu pour encercler la capitale et soulager ses artères congestionnées, prend forme après des années de promesses. Le ministre Gisaro, entouré des responsables de l’Agence congolaise des grands travaux, a arpenté les nouveaux tracés jusqu’au quartier Ndjoku, inspectant chaque courbe comme un chirurgien vérifierait une suture vitale. « Le rêve du Président de la République commence à devenir réalité », a-t-il affirmé, une déclaration qui résonne comme un baume pour les milliers d’automobilistes étouffant quotidiennement dans les embouteillages kinois.
Concrètement, cette phase cruciale concerne le point kilométrique 13 et s’étend sur les zones urbano-rurales stratégiques de Mfuti et Mitendi. L’entreprise chinoise CREC 8 assure les travaux sous la double supervision de l’Office de la voirie et du drainage et de l’Agence des grands travaux. Pendant que le Sud-Ouest voit naître sa chaussée noire, le Sud-Est reste l’affaire de CREC 4, créant ainsi une course contre la montre pour désenclaver ces périphéries longtemps oubliées.
Mais derrière les machines et les discours officiels, quelle vie nouvelle se dessine pour les riverains ? À Ngudiabaka, des commerçants observent, sceptiques, les rouleaux compresseurs. « On nous parle de fluidifier la circulation capitale RDC depuis dix ans », lâche Mama Léontine, dont l’échoppe de charbon domine le chantier. « Mais quand cette route amènera-t-elle l’eau courante dans nos cases ? » Une question qui rappelle que les projets routiers doivent aussi irriguer le développement social.
L’enjeu dépasse le simple asphaltage. Cette rocade périphérique pourrait redistribuer les flux économiques et désengorger le centre-ville étouffant. Le ministre Gisaro y voit « un espoir pour la suite », mais les habitants de Mont-Ngafula, eux, attendent des preuves tangibles. Comment ce boulevard transformera-t-il leur accès aux marchés, aux écoles, aux hôpitaux ? Le bitume seul suffira-t-il à panser les plaies d’une urbanisation anarchique ?
Alors que les compacteurs vibrent sur la terre rouge, un autre défi se profile : la durabilité. L’histoire récente de la RDC est pavée d’infrastructures éphémères. La surveillance accrue promise par les autorités sera-t-elle à la hauteur des intempéries tropicales et d’un trafic toujours plus dense ? Cette route des Rocades porte en elle les espoirs d’une capitale asphyxiée. Elle pourrait devenir le symbole d’une nouvelle ère pour les infrastructures Kinshasa… ou un autre serpent de mer dans l’océan des promesses non tenues. La réponse s’écrit maintenant, mètre après mètre, sous les pneus des camions de CREC 8.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net