Entre Asunción, Paris et El Hierro, trois destins de femmes africaines ont tracé une semaine révélatrice des contrastes saisissants de notre époque. Comment ne pas voir dans ces trajectoires croisées le reflet des combats, des réussites et des vulnérabilités qui traversent nos sociétés ?
À Asunción, un vent d’espoir soufflait le 15 mai dernier lorsque Belinda Luntadila, avocate congolaise, a été élue à la commission de discipline de la FIFA. Cette nomination historique pour la RDC place cette experte juridique au cœur de l’instance qui sanctionne clubs, joueurs et officiels du football mondial. “C’est une reconnaissance du potentiel juridique africain”, confie un membre de la FECOFA sous couvert d’anonymat. Déjà pilier de la gouvernance du football national, Luntadila incarne cette nouvelle génération de femmes africaines qui brisent les plafonds de verre institutionnels.
Pendant ce temps, à Roland-Garros, la Tunisienne Ons Jabeur livrait un tout autre combat. Éliminée dès le premier tour, la 36ᵉ mondiale a pointé du doigt une injustice systémique : “Pourquoi les matchs féminins sont-ils systématiquement exclus des sessions nocturnes ?”. Sa critique acerbe visait la Fédération française de tennis et Amazon Prime, accusés de marginaliser les joueuses. “Quand des affiches comme Osaka-Badosa passent inaperçues, c’est tout le sport féminin qui trinque”, déplorait-elle, rallumant le débat sur l’égalité de traitement dans les tournois majeurs.
Mais c’est au large des Canaries que le drame le plus brutal est survenu. Mercredi 29 mai, un naufrage a englouti sept vies : quatre femmes et trois jeunes filles. Parmi une centaine de migrants entassés sur une embarcation de fortune, ces victimes symbolisent l’extrême précarité des routes migratoires. “Elles ont péri par déséquilibre lors du transfert vers le bateau de sauvetage”, rapporte un sauveteur, la voix nouée. Deux enfants évacués en urgence par hélicoptère rappellent l’urgence d’agir face à ces traversées meurtrières.
Trois événements, trois continents, un même fil rouge : la place des femmes africaines dans les bouleversements mondiaux. La trajectoire de Belinda Luntadila FIFA montre que les barrières tombent lentement. Le combat d’Ons Jabeur Roland-Garros révèle les résistances persistantes. Le naufrage aux Canaries femmes exposent leur vulnérabilité extrême dans les crises humanitaires.
Que nous disent ces histoires croisées ? Peut-être que la reconnaissance institutionnelle, comme celle obtenue par Luntadila à la commission discipline FIFA, ne suffit pas. Que les prises de parole courageuses, à l’image de Jabeur, doivent s’accompagner de changements concrets. Et que les tragédies silencieuses, telle celle des Canaries, exigent plus que des condoléances officielles. Dans l’arène internationale comme dans les eaux méditerranéennes, les femmes africaines restent en première ligne – tantôt pionnières, tantôt oubliées. Leur semaine révélatrice nous interroge : jusqu’à quand fermerons-nous les yeux sur ces fractures ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd