La place de l’Indépendance de Kananga vibrait ce samedi 25 mai sous les acclamations de milliers de citoyens, témoins d’un discours aussi ferme qu’historique. Judith Suminwa Tuluka, Première ministre de la République démocratique du Congo, a transformé cette tribune en tribune d’engagements concrets, martelant une phrase qui résonnera dans les mémoires : « Votre patience a assez duré, place à l’action ! ». Dans un contexte où les promesses politiques s’évaporent souvent comme rosée au soleil, cette déclaration sonne-t-elle comme une révolution ou un pari risqué pour le gouvernement Tshisekedi ?
Face à une foule en liesse, la cheffe du gouvernement a d’abord planté le décor des défis nationaux. « Notre force réside dans notre unité », a-t-elle affirmé, évoquant l’agression rwandaise à l’Est avec une gravité mesurée. Son hommage appuyé aux Forces armées et aux combattants Wazalendo a soulevé des ovations, mais c’est sur le terrain des projets Kasaï Central que son discours a pris une dimension opérationnelle. La route Kananga-Kalamba Mbuji, vitale pour désenclaver la région, fera l’objet d’inspections personnelles de sa part. Un signal fort, alors que les chantiers inachevés parsèment le paysage congolais.
Plus percutant encore, l’engagement sur le barrage de Katende, projet phare abandonné aux calendes grecques. « Les travaux vont être relancés comme le veut le Chef de l’État », a-t-elle assuré, transformant cette annonce en test de crédibilité pour l’exécutif. Dans une région où l’accès à l’eau potable et à l’électricité relève du parcours du combattant, cette promesse porte l’espoir d’une transformation tangible. La lutte contre les érosions « qui dévorent vos quartiers » complète ce triptyque d’urgences, dessinant une feuille de route aux accents pragmatiques.
Le discours de la Première ministre a toutefois dépassé le cadre technique pour embrasser l’échiquier politique. En liant explicitement ces chantiers aux promesses électorales du président Tshisekedi, elle a placé son gouvernement sous le feu des attentes populaires. « Chaque franc volé sera traqué, chaque retard sanctionné », a-t-elle tonné, dans une allusion transparente à la corruption endémique. Cet engagement solennel, inscrit dans le Programme d’Actions du Gouvernement 2024-2028, résonne comme un ultimatum à l’administration. Mais gare aux déceptions : dans un pays où les annonces flamboyantes butent souvent sur les réalités du terrain, la population guettera la traduction en actes.
L’appel à l’unité nationale RDC a constitué l’autre pilier de son intervention. En associant Kananga à Goma et Kinshasa dans « cette patrie indivisible », Judith Suminwa Tuluka a habilement transcendé les clivages régionaux. Une stratégie politique subtile, alors que la crise orientale menace la cohésion nationale. Son passage sur la défense de « chaque centimètre du territoire » derrière le président Tshisekedi n’est pas anodin : il consolide la légitimité du pouvoir central face aux velléités séparatistes.
Accompagnée du ministre des Mines Kizito Pakabomba et de la vice-ministre de l’Intérieur Eugénie Tshiela Kamba, la cheffe du gouvernement a ainsi planté les jalons d’une nouvelle gouvernance. Les cris de soutien et chants patriotiques qui ont salué sa sortie témoignent d’une adhésion populaire palpable. Reste à savoir si ce volontarisme affiché résistera à l’épreuve des calendriers et des budgets. La relance du barrage de Katende, symbole des espoirs déçus, deviendra-t-elle le baromètre de la sincérité gouvernementale ? L’avertissement est clair : après des années d’attente, le Kasaï Central compte les jours avant de voir l’action promise se matérialiser.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: primature.grouv.cd