La démarche de Joseph Kabila en quête de paix dans l’Est congolais suscite des réactions contrastées. Après sa rencontre du 29 mai à Goma avec les confessions religieuses où l’ancien chef de l’État a sollicité un soutien pour sa « mission de paix », l’Institut pour les Droits Humains (IRDH) apporte une réponse nuancée, mêlant approbation et désaveu cinglant.
Si l’IRDH souscrit aux virulentes critiques formulées par Kabila contre l’actuel pouvoir – dénonçant pêle-mêle les velléités de modification constitutionnelle, la gabegie financière, ou l’institutionnalisation de la corruption –, l’organisation rejette catégoriquement sa rhétorique militaire. Le fameux « serment de soldat » évoqué par le président honoraire, promettant « le sacrifice suprême », est perçu comme une menace contre la paix même qu’il prétend servir. Cette posture belliqueuse, souligne l’Institut, relègue au second plan son rôle affiché de pacificateur dans une région minée par le conflit M23 en RDC.
Plus troublant encore, l’IRDH pointe un silence éloquent. Dans son discours, Joseph Kabila aurait dû, selon l’ONG, se positionner clairement sur la résolution 2773 du Conseil de sécurité de l’ONU adoptée en février 2025. Ce texte onusien, capital pour la résolution du conflit dans l’Est, condamne explicitement le soutien rwandais à l’offensive du M23 et exige le retrait des troupes étrangères du territoire congolais. Un sujet brûlant alors que les rapports des Nations Unies documentent des violations graves des droits humains dans les zones contrôlées par les rebelles.
Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme, Volker Türk, a dressé un tableau accablant : utilisation d’explosifs en zones peuplées, exécutions sommaires, violences sexuelles systématiques. Des bombes ont même frappé des sites de déplacés, transformant des civils en cibles. Face à cette réalité, la « mission de paix » kabiliste peut-elle faire l’impasse sur ces crimes ? L’IRDH en doute, rappelant que les attentes des victimes sont ignorées dans l’équation actuelle.
L’Institut presse donc l’ancien président d’aligner ses actions avec ses déclarations aux leaders religieux. Plutôt que des serments martiaux, c’est une adhésion sans réserve aux mécanismes internationaux et une attention aux souffrances concrètes des populations que réclame l’ONG. La crédibilité de cette initiative de paix en RDC se jouera sur sa capacité à intégrer ces exigences fondamentales. Dans un contexte où les rapports de l’ONU sur la RDC pointent une détérioration continue, la marge de manœuvre se rétrécit comme peau de chagrin. Joseph Kabila parviendra-t-il à transformer sa croisade personnelle en véritable projet collectif ? Rien n’est moins sûr.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd