Imaginez devoir fuir votre foyer sous les balles, emportant à peine le strict minimum, quand soudain votre corps vous rappelle une nécessité biologique implacable. Cette réalité brutale frappe des milliers de femmes déplacées au Nord-Kivu, où moins de 2% des besoins en produits menstruels sont actuellement couverts, selon une révélation choc de l’UNFPA.
En mission à Beni à l’occasion de la Journée mondiale de l’hygiène menstruelle, Noemi Dalmonte, représentante adjointe de l’agence onusienne, a décrit une crise humanitaire menstruelle aux conséquences dévastatrices. « Une femme qui fuit sans rien et a ses règles deux jours après vit dans la honte et l’inconfort total », a-t-elle illustré, soulignant comment la guerre vole aux femmes jusqu’à leur dignité la plus intime.
Comment une telle carence est-elle possible en 2024 ? Les chiffres parlent d’eux-mêmes : seulement 11 000 kits d’hygiène menstruelle sont prévus cette année pour toute la région, une goutte d’eau face à l’océan des besoins. Ces kits, contenant serviettes réutilisables, savon et sous-vêtements, représentent pourtant une bouée de sauvetage. Sans eux, les femmes improvisent avec des chiffons sales, augmentant les risques d’infections urogénitales potentiellement mortelles.
Mais l’impact va bien au-delà de la santé physique. Mme Dalmonte pointe un autre drame invisible : le manque criant d’éducation menstruelle chez les jeunes filles déplacées. Privées de conseils basiques sur leur propre corps, beaucoup deviennent des proies faciles. « Cette méconnaissance alimente directement les cas de grossesses précoces dans les camps et familles d’accueil », explique-t-elle, décrivant un cercle vicieux où la précarité menstruelle engendre de nouvelles vulnérabilités.
Face à cette urgence qualifiée de « silencieuse mais cruciale », l’UNFPA lance un appel pressant aux partenaires humanitaires. La solution passe par un triple effort :
- Augmenter massivement la distribution de kits adaptés aux réalités locales
- Intégrer systématiquement des modules d’éducation sexuelle dans l’aide d’urgence
- Déstigmatiser les menstruations dans les communautés d’accueil
Car derrière les statistiques se cachent des visages. Comme ceux de ces adolescentes contraintes de manquer l’école plusieurs jours par mois par manque de protections. Ou ces mères forcées de troquer une partie de leur ration alimentaire contre un paquet de serviettes. En cette Journée mondiale, le Nord-Kivu nous rappelle une vérité élémentaire : la dignité menstruelle n’est pas un luxe, mais un droit humain fondamental. La réponse à cette crise sera le vrai test de notre humanité commune.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net