L’administration congolaise serait-elle enfin à l’aube d’une métamorphose salariale historique ? Alors que le vice-Premier ministre Jean-Pierre Lihau a officiellement lancé mardi les travaux techniques d’élaboration de la nouvelle politique salariale des agents publics, cette réforme tant attendue pourrait bien ressembler à un pari politique à haut risque. Sous l’impulsion présidentielle, cette refonte ambitieuse promet d’extirper les disparités salariales injustifiées qui gangrènent l’administration publique depuis des décennies. Mais le chemin s’annonce semé d’embûches techniques et budgétaires.
Dans son discours d’orientation, Lihau a martelé trois piliers fondateurs : corriger les écarts de rémunération « ni justifiés par la fonction ni par la performance », instaurer une grille unique garantissant équité et transparence, et promouvoir le mérite par des critères objectifs. Cette démarche, présentée comme un remède aux dysfonctionnements chroniques, soulève cependant une question cruciale : comment concilier justice salariale et contraintes financières dans un État aux ressources limitées ? Les experts devront résoudre cette équation complexe où chaque décision pèsera lourd dans la crédibilité du gouvernement.
L’annonce intervient dans un contexte où, comme le souligne Infos 27, « rarement une réforme de la fonction publique aura suscité autant d’attentes ». Portée par une volonté politique affichée, cette politique salariale des agents publics pourrait effectivement devenir un levier de transformation majeure – à condition de surmonter les obstacles structurels hérités. Les disparités salariales actuelles, véritables bombes à retardement sociales, minent depuis trop longtemps l’efficacité administrative et la moralisation du service public. Le gouvernement joue donc son crédit sur cette réforme salariale en RDC, dont l’échec pourrait fragiliser durablement la confiance des partenaires sociaux.
Dans un registre parallèle mais tout aussi préoccupant, l’épidémie de Mpox en RDC montre des signes de légère régression selon l’Institut national de santé publique (INSP). Les derniers chiffres font état de 182 nouveaux cas hebdomadaires, portant le total à 21 452 contaminations depuis janvier 2024. Pourtant, cette embellie statistique masque une réalité alarmante : la prison militaire de Ndolo à Kinshasa compte désormais 30 cas confirmés, dont un décès. Ce foyer carcéral, loin d’être isolé, interroge sur l’efficacité des dispositifs de confinement en milieu fermé. Comment expliquer que les prisons deviennent des incubateurs épidémiques malgré les alertes répétées ?
La concomitance de ces deux dossiers – la réforme salariale et la gestion sanitaire – dessine en filigrane le défi de gouvernance auquel fait face le pays. Si la politique salariale promet de restructurer l’administration publique, la crise du Mpox à la prison Ndolo rappelle cruellement les failles persistantes dans la protection des populations vulnérables. Les prochaines semaines seront déterminantes : les conclusions du comité technique sur les grilles de rémunération devront prouver leur applicabilité concrète, tandis que la riposte à l’épidémie nécessitera des mesures ciblées pour éviter que les établissements pénitentiaires ne deviennent des épicentres incontrôlables. L’équation congolaise se résumera-t-elle à choisir entre justice sociale et santé publique ? Ou le gouvernement parviendra-t-il à relever ces deux défis simultanés ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net