Le Gouvernement de la République Démocratique du Congo franchit un pas décisif dans sa quête de modernisation administrative avec le lancement du nouveau passeport biométrique OACI, une initiative présentée comme la pierre angulaire de la digitalisation des services consulaires. Cette réforme, annoncée ce mardi 27 mai 2025, cristallise à la fois les ambitions technocratiques du pouvoir et les attentes d’une population longtemps confrontée à des procédures labyrinthiques. Mais derrière les annonces officielles se cachent des enjeux qui dépassent le simple remplacement d’un document.
Dès le 5 juin 2025, la demande passeport en ligne RDC deviendra l’unique sésame pour obtenir ce précieux document. Une révolution administrative ? Le ministère des Affaires Étrangères le proclame, arguant de la fin des files interminables et des intermédiaires peu scrupuleux. Pourtant, la mise en place des « nouveaux centres de capture » à Kinshasa et en province suscite déjà des interrogations. Les infrastructures techniques résisteront-elles à l’afflux prévisible des requérants ?
Le coût passeport 75 USD, fixé par décret présidentiel, est brandi comme un symbole de justice sociale. « Une décision historique pour soulager nos compatriotes », a martelé Thérèse Kayikwamba, ministre des Affaires Étrangères. Mais cette baisse tarifaire interroge : comment concilier accessibilité et financement d’un système biométrique de pointe confié à l’allemand Dermalog passeport RDC ? Le choix de ce partenaire, après l’épisode Semlex, soulève autant d’espoirs que de méfiance quant à la sécurisation des données.
Techniquement, le document se pare d’atouts incontestables : micropuce RFID, page en polycarbonate, hologrammes… Autant de boucliers contre la fraude, conformes à la norme OACI 39794. « Ce passeport est un rempart pour la souveraineté numérique congolaise », assurent les officiels. Mais cette rhétorique sécuritaire suffira-t-elle à effacer les doutes sur les délais de traitement ? La coexistence jusqu’en 2030 entre anciens et nouveaux passeports risque de créer une zone grise propice aux contournements.
Sur le plan politique, ce lancement s’inscrit dans une stratégie plus vaste de reconquête de crédibilité. En raccourcissant les délais et en uniformisant les tarifs, le pouvoir tente de désamorcer une bombe sociale longtemps alimentée par les scandales de corruption dans les ambassades. Reste à savoir si cette « modernisation par le haut » parviendra à transformer durablement les mentalités administratives. L’enjeu est de taille : faire du passeport, cet objet éminemment symbolique, le marqueur d’un État enfin à l’écoute de sa diaspora.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd