Dans un contexte politique tendu, la rencontre entre Joseph Kabila et les dirigeants de l’AFC/M23 à Goma suscite interrogations et spéculations. L’ancien président, récemment privé de son immunité parlementaire, a reçu ce mardi Corneille Nangaa, coordonnateur politique du mouvement rebelle soutenu par le Rwanda, accompagné de Bertrand Bisimwa. Cette prise de contact officieuse dans le bastion de l’AFC/M23 interroge sur les recompositions en cours dans l’est de la RDC.
« Le salamalek n’est qu’un prélude », confie une source proche du dossier à Congo Quotidien. Derrière les salutations protocolaires se profile une stratégie minutieuse : Joseph Kabila entreprend une vaste tournée consultative auprès des forces vives du Nord-Kivu. Gouverneur, maires, chefs coutumiers, leaders religieux et acteurs économiques – tous sont conviés à présenter leur diagnostic de la crise sécuritaire qui ravage la province.
Ce marathon diplomatique régional cache-t-il une ambition nationale ? Le report de la publication de son agenda officiel, initialement prévue ce mardi, révèle l’ampleur des tractations en coulisse. « Il veut comprendre la situation par lui-même avant toute décision », précise un membre du comité d’organisation. Méthodique, l’ancien chef de l’État privilégie les rencontres en petit comité, recueillant mémorandums et doléances.
Cette approche contraste avec les récentes sorties médiatiques de Joseph Kabila dénonçant la « gouvernance non orthodoxe » de Félix Tshisekedi. Dans sa critique acerbe du régime actuel, l’ex-président dresse un réquisitoire implacable : corruption endémique, autoritarisme présidentiel, effondrement socio-économique. Son « pacte citoyen » en douze points se présente comme l’antidote à ce qu’il qualifie de « naufrage institutionnel ».
Mais cette offensive verbale masque-t-elle une vulnérabilité nouvelle ? La levée récente de son immunité parlementaire par le Sénat, ouvrant la voie à des poursuites pour complicité avec la rébellion, donne une actualité brûlante à ces consultations à Goma. En s’affichant avec les leaders de l’AFC/M23 – mouvement accusé de collusion avec Kigali –, Joseph Kabila joue-t-il avec le feu ou tisse-t-il les fils d’une nouvelle stratégie d’influence ?
Les prochains jours s’annoncent décisifs. La conférence de presse annoncée à l’issue de ces consultations pourrait marquer un tournant. Reste à savoir si cette mue politique parviendra à redorer un blason terni par les accusations de soutien aux groupes armés, ou si elle précipitera au contraire son isolement sur l’échiquier national.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd