Dans un contexte où la malnutrition infantile touche près de 42% des enfants de moins de cinq ans à Kinshasa selon l’UNICEF, une lueur d’espoir émerge grâce à l’initiative d’une étudiante de 21 ans. Mavinga Makila Marie Christelle, fondatrice de la bouillie MAISHA, incarne cette nouvelle génération d’entrepreneures congolaises déterminées à transformer les défis sanitaires en opportunités économiques. Son parcours, marqué par un combat personnel contre les allergies alimentaires, l’a conduite à créer un produit novateur ancré dans le terroir local.
Comment une simple idée peut-elle devenir une arme contre la malnutrition ? Pour cette étudiante en communication sociale à l’Université Catholique du Congo, la réponse se trouve dans le kikalakasa, ce pois carré africain méconnu qui lui sauva la vie étant enfant. « Ma mère, infirmière formée en nutrition, m’a nourrie avec un mélange de lait de soja et de kikalakasa lorsque les laits artificiels provoquaient chez moi des réactions allergiques violentes », confie-t-elle. Cette expérience fondatrice est à l’origine d’une entreprise sociale qui allie innovation agroalimentaire et valorisation des ressources congolaises.
La composition de la bouillie MAISHA représente une rupture avec les solutions importées : un mélange stratégique de maïs, soja et kikalakasa spécialement dosé pour combler les carences nutritionnelles. Le kikalakasa, véritable trésor nutritionnel sous-utilisé en RDC, apporte des protéines complètes, les neuf acides aminés essentiels et des propriétés antioxydantes documentées par la recherche agronomique. « C’est un aliment-médicament qui pourrait réduire de 30% les cas de retard de croissance s’il était systématisé », avance la jeune entrepreneure, soulignant son potentiel pour les nourrissons, femmes enceintes et personnes âgées.
Pourtant, le parcours entrepreneurial de Mavinga Makila illustre les défis structurels de l’entrepreneuriat féminin au Congo. La méconnaissance du kikalakasa constitue le premier obstacle : « Convaincre les consommateurs demande un travail pédagogique constant », explique-t-elle. La production artisanale, gérée en famille entre les cours universitaires, et la distribution limitée au bouche-à-oreille révèlent les difficultés d’accès aux circuits formels. Malgré cela, la demande croît de 15% mensuellement selon ses estimations, signe que le « made in Congo » séduit progressivement les Kinois.
Quelles perspectives pour ce modèle économique novateur ? Mavinga Makila envisage une verticalisation complète de sa chaîne de valeur : acquisition de terres agricoles pour cultiver le kikalakasa – espèce menacée de disparition –, installation d’un moulin industriel et création de la première usine congolaise spécialisée dans les bouillies médicinales. Ces projets pourraient générer une cinquantaine d’emplois directs, principalement féminins, dans les trois prochaines années.
Son message aux futures entrepreneures résonne comme un manifeste économique : « Valorisez nos ressources locales, croyez en votre potentiel et persévérez ». Alors que les produits importés dominent encore 70% du marché des aliments thérapeutiques à Kinshasa, la bouillie MAISHA démontre que l’autosuffisance nutritionnelle passe par l’innovation endogène. Cette aventure entrepreneuriale pourrait bien inspirer une nouvelle génération de femmes transformant les défis sanitaires en leviers de développement durable.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
