Lancement ce lundi 26 mai à Kinshasa d’un atelier crucial pour la décentralisation congolaise : l’examen minutieux des recommandations issues de la 11ᵉ Conférence des gouverneurs de Kalemie s’annonce comme un test décisif pour l’administration territoriale. Trois jours durant, experts et décideurs scruteront l’avancée du Programme de développement local des 145 territoires (PDL-145), ce serpent de mer de la gouvernance provinciale.
Jacquemain Shabani, vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur, a posé d’emblée les enjeux : « Il s’agit de responsabiliser les acteurs et de réajuster les stratégies ». Une déclaration qui sonne comme un aveu implicite des retards accumulés dans l’exécution des infrastructures promises. Le PDL-145, fer de lance du gouvernement pour désenclaver les territoires, peine visiblement à concrétiser ses ambitions.
Derrière les discours sur la « transparence » exigée par le ministre se profile l’épineuse question des salaires des responsables provinciaux. Les gouverneurs réclament depuis Kalemie un financement régulier des exécutifs locaux – revendication qui pourrait bien déterminer l’issue de cette évaluation. Comment prétendre améliorer la gouvernance provinciale sans assurer les moyens élémentaires de son fonctionnement ?
Plus troublant encore : les propositions de réforme électorale avancées lors de la 11ᵉ session. La modification des modes de scrutin pour les gouverneurs et députés provinciaux ressemble à une bombe à retardement politique. Certains y verront-ils une manœuvre pour consolider les bastions régionaux du pouvoir central ? La question mérite d’être posée à l’heure où se profile la 12ᵉ session de Kolwezi en juin 2025.
Cet atelier de Kinshasa servira-t-il de prélude à un rééquilibrage des pouvoirs entre le centre et les provinces ? Les recommandations sur la gestion des administrateurs de territoire laissent entrevoir une recentralisation sournoise sous couvert de rationalisation administrative. Un paradoxe pour un gouvernement qui se targue de promouvoir la décentralisation.
Tous les regards convergent désormais vers Kolwezi où se jouera en 2025 la suite de ce feuilleton institutionnel. Le thème choisi – « La santé, facteur de cohésion sociale » – masquera-t-il les vrais enjeux de pouvoir ? Une chose est sûre : l’échec du PDL-145 deviendrait le talon d’Achille d’une administration territoriale déjà malmenée par les défis logistiques et les rivalités politiques.
Entre les promesses non tenues de Kalemie et les ambitions affichées pour Kolwezi, le gouvernement marche sur un fil. La crédibilité du modèle de gouvernance provinciale en RDC se joue aujourd’hui dans les calculs technocratiques de Kinshasa. Reste à savoir si les conclusions de cet atelier serviront de boussole stratégique… ou de simple cautère sur une jambe de bois institutionnelle.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net