Dans un contexte politique congolais marqué par des tensions croissantes, le débat sur le tribalisme s’invite une nouvelle fois au cœur de l’arène médiatique. Alors que l’ancien président Joseph Kabila accuse le régime de Félix Tshisekedi d’avoir institutionnalisé le tribalisme, Augustin Kabuya, secrétaire général de l’UDPS, oppose une réfutation méthodique, détaillant les nominations clés pour contrer ces allégations. Une joute verbale qui révèle autant les fractures politiques que les stratégies de déstabilisation à l’œuvre.
Intervenant lors d’une matinée politique au siège de l’UDPS, Augustin Kabuya a démonté point par point les accusations portées par le Front Commun pour le Congo (FCC). En citant les origines provinciales des responsables des services de sécurité, de l’armée, et des institutions financières, il a souligné la diversité géographique des nominations : « Le numéro Un de l’ANR n’est pas originaire du Kasaï Oriental, il est du Kwilu. Le Chef d’État-major des FARDC, Jules Banza, est Katangais. Madame la Première ministre Judith Suminwa est du Kongo Central ». Une énumération qui se veut une preuve tangible du rejet du népotisme.
Mais derrière cette défense en règle se cache une question sous-jacente : pourquoi ces accusations ressurgissent-elles avec une telle virulence ? Pour Kabuya, la réponse est sans équivoque. Il s’agirait d’une manœuvre orchestrée pour « salir et discréditer Félix Tshisekedi », notamment en instrumentalisant un discours victimisant. « Les gens se sont organisés pour utiliser les mensonges comme arme politique », a-t-il asséné, dénonçant une tentative de manipulation de l’opinion publique.
Pourtant, Joseph Kabila, dans son message du 23 mai, persiste à décrire un pouvoir centralisé et clanique. Selon lui, le tribalisme serait devenu un « mode de gouvernance », tandis que le Parlement et la justice perdraient leur rôle de contre-pouvoir. Des critiques qui résonnent dans un pays où les clivages régionaux ont souvent servi de leviers aux rivalités politiques. Le FCC, par la voix de son autorité morale, tente ainsi de rallier les mécontents en brandissant l’étendard de l’unité nationale menacée.
Cette polémique soulève cependant une interrogation plus profonde : comment concilier représentation équitable et efficacité gouvernementale dans un pays aux identités multiples ? Si Kabuya brandit la diversité des nominations comme un gage d’équité, ses détracteurs y voient une fragmentation calculée. Le débat dépasse alors la simple question du tribalisme pour toucher à la légitimité même d’un pouvoir en quête d’ancrage populaire.
À l’approche des échéances électorales de 2026, ces échanges acerbes préfigurent une campagne déjà tendue. Les accusations de tribalisme, qu’elles soient fondées ou instrumentalisées, risquent de polariser davantage le paysage politique. Reste à savoir si les Congolais se laisseront séduire par ces rhétoriques ou exigeront des preuves concrètes d’une gouvernance inclusive. Pour l’UDPS comme pour le FCC, l’enjeu est désormais de transformer les mots en actes – sous peine de voir le fossé de la défiance s’élargir irrémédiablement.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd