Le gouvernement congolais a franchi un pas décisif dans la mise en œuvre de la politique économique de Félix Tshisekedi en adoptant quatre décrets structurants pour l’écosystème entrepreneurial. Une avancée présentée comme salvatrice, mais qui suscite des interrogations sur sa capacité à transcender les lourdeurs administratives historiques.
Lors du 44ᵉ conseil des ministres, Louis Watum Kabamba a déployé une batterie de textes visant à opérationnaliser les Ordonnances-loi de 2022. Au menu : création d’un Comité national de labellisation des Startups, mise en place d’un dispositif de pilotage de l’entrepreneuriat, et fixation des avantages accordés aux entreprises labellisées. Derrière ce jargon institutionnel se cache une volonté affichée de transformer l’essai législatif en réalité économique.
« L’entrepreneuriat n’est pas un luxe mais une nécessité stratégique », martèle le chef de l’État. Son insistance à accélérer le développement des PME révèle une urgence : faire de la RDC un hub entrepreneurial capable de rivaliser avec les géants continentaux. Mais comment concilier cette ambition avec les pesanteurs d’un système réputé pour ses lenteurs bureaucratiques ?
Le dispositif prévoit des avantages substantiels pour les startups labellisées : exonérations fiscales ciblées, accès privilégié aux marchés publics, et accompagnement technique. Une manne attractive qui pourrait drainer les investissements, à condition que les comités de labellisation résistent aux tentations clientélistes. La nécessaire harmonisation avec le ministère des Finances, mentionnée dans le compte-rendu, laisse entrevoir les tensions interministérielles habituelles.
Félix Tshisekedi y voit « un pilier de la souveraineté économique ». Pourtant, deux ans après l’adoption des textes fondateurs, le retard accumulé dans leur application interroge. Le président congolais joue ici sa crédibilité en matière de réforme structurelle. Son discours volontariste bute sur un paradoxe : peut-on bâtir un écosystème startup dynamique sans assainir au préalable le climat des affaires ?
L’ordonnance-loi de 2022, dont ces décrets constituent le bras opérationnel, ambitionne de créer un régime dérogatoire pour les PME innovantes. Un cadre juridique hybridant incitations économiques et flexibilité réglementaire. La distinction entre entrepreneuriat social et économique introduit une segmentation novatrice, mais soulève des questions pratiques quant à son application.
Reste que ces avancées réglementaires arrivent à point nommé dans un contexte de compétition économique régionale accrue. Le vrai test consistera à mesurer leur traduction concrète dans les prochains mois. Entre volonté réformatrice et inertie administrative, la marge de manœuvre du gouvernement s’annonce étroite. La réussite de ce dispositif dépendra de sa capacité à créer un choc de simplification face à l’hydre bureaucratique congolaise.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd