Dans un contexte de tensions croissantes dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC), un groupe bipartite de sénateurs américains a interpellé la communauté internationale ce vendredi. Leur déclaration conjointe souligne à la fois les défis persistants et les avancées diplomatiques récentes, alors que la région traverse l’une des crises humanitaires les plus complexes de la décennie.
Les sénateurs Jim Risch, Jeanne Shaheen, Chris Coons, Ted Cruz, Cory Booker et John Cornyn ont exprimé une inquiétude unanime face à l’escalade des violences impliquant le mouvement rebelle M23, régulièrement accusé de bénéficier du soutien rwandais. « Les civils paient un tribut insoutenable », ont-ils déclaré, rappelant que plus de 800 000 déplacés ont été enregistrés depuis janvier 2025. Un chiffre qui fait écho aux alertes répétées des ONG sur les risques de famine et d’effondrement sanitaire.
Comment expliquer cette implication soudaine du Congrès américain ? La réponse réside peut-être dans les récentes négociations de Washington. Le 25 avril dernier, sous l’égide du secrétaire d’État adjoint Marco Rubio, Kinshasa et Kigali ont signé une Déclaration de principes qualifiée d’« historique » par les législateurs. Ce document, resté partiellement confidentiel, jetterait les bases d’un désengagement militaire progressif et d’un mécanisme de vérification indépendant.
Pourtant, les sénateurs restent prudents. Leur texte insiste sur la nécessité d’« ancrer le processus dans les réalités locales » en associant les chefs traditionnels et les organisations de la société civile. Une exigence qui répond aux critiques sur le caractère trop élitiste des précédentes initiatives de paix. « Sans inclusion des populations frontalières, aucun accord ne tiendra », analyse un expert congolais sous couvert d’anonymat.
La dimension régionale du conflit RDC-Rwanda complique davantage le tableau. Si les accusations de soutien au M23 visant Kigali ne sont pas nouvelles, leur reprise par des élus influents à Washington pourrait signaler un tournant. Ted Cruz et Cory Booker, pourtant opposés sur de nombreux dossiers, ont uni leurs voix pour exiger « une enquête internationale sur les flux d’armes » – allusion à peine voilée aux rapports de l’ONU documentant des transferts transfrontaliers.
Reste que l’optimisme des signataires transparaît à travers leur soutien affiché à la médiation américaine. En saluant « l’esprit constructif » des parties, ils espèrent visiblement éviter un scénario à la libyenne où les pourparlers s’enlisent dans les rivalités géopolitiques. Leur appel à un accès humanitaire « sans entrave » répond par ailleurs aux récentes restrictions imposées par certains groupes armés – un obstacle majeur à l’acheminement de l’aide.
Quelles implications pour l’avenir ? Les observateurs s’accordent sur un point : cette déclaration renforce le rôle des États-Unis comme arbitre régional, au détriment des acteurs européens traditionnels. Pour la RDC, c’est à la fois une opportunité et un risque. Si Joe Biden parvient à maintenir la pression sur Kigali, Kinshasa pourrait retrouver une stabilité oubliée depuis des décennies. Dans le cas contraire, les espoirs nés à Washington risquent de se heurter, une fois encore, à la réalité des combats dans le Kivu.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd