Une journée ordinaire transformée en cauchemar. Ce samedi 24 mai, la commune de Kanzala à Tshikapa a vécu l’indicible lorsqu’un camion, parti du marché Kamalenga, a semé la mort sur son passage. « Il dévalait la pente comme un bolide… On n’a même pas eu le temps de courir », raconte Mama Kapinga, commerçante témoin de la scène. À quelques mètres de l’aéroport national, le poids lourd a perdu le contrôle, pulvérisant tout sur sa route. Bilan provisoire : 20 morts, des dizaines de blessés, une communauté en lambeaux.
Comment un trajet routinier vers la morgue nationale a-t-il pu virer au carnage ? Les témoins évoquent une vitesse excessive et une descente abrupte mal sécurisée. « Cette route est une épine dans le pied depuis des années », soupire un habitant sous couvert d’anonymat. Les images qui circulent montrent des corps inertes recouverts de pagnes, des motos écrasées, des cris étouffés par l’horreur.
Dans les heures qui ont suivi, l’improvisation a régné. Sans services de secours suffisants, ce sont les riverains qui ont transporté les victimes vers les hôpitaux surchargés. « Mon neveu saignait abondamment… On a dû le porter à bout de bras pendant 30 minutes », confie un oncle éploré. À l’heure où nous écrivons, aucune déclaration officielle ne précise l’origine exacte de l’accident. Silence assourdissant des autorités provinciales, colère sourde dans les ruelles.
Ce drame relance pourtant une question brûlante : jusqu’à quand la RDC ignorera-t-elle l’hécatombe routière qui frappe ses villes ? Entre camions surchargés, infrastructures délabrées et contrôles techniques fantômes, les ingrédients du désastre s’accumulent. À Tshikapa comme ailleurs, chaque famille a son histoire de deuil liée aux routes. « On enterre nos morts en sachant que demain, ce sera peut-être notre tour », lâche amèrement un jeune rencontré près du lieu du drame.
Alors que les familles tentent d’identifier leurs proches à la morgue, une autre bataille commence : celle de la mémoire. Les victimes, majoritairement des petits commerçants et des motards, laissent derrière elles des enfants sans soutien, des épouses sans revenus. La solidarité locale s’organise tant bien que mal, fragile rempart contre l’oubli. Mais face à l’ampleur du désastre, les bras tendus ne suffiront pas.
Ce drame de Tshikapa n’est pas une fatalité. Il sonne comme un rappel cruel : sans investissement massif dans la sécurité routière et l’entretien des axes dangereux, le Congo continuera de compter ses morts au bord des routes. Quand les autorités prendront-elles enfin ce fléau au sérieux ? La balle est dans leur camp. En attendant, Kanzala pleure.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
