Le gouvernement de la République Démocratique du Congo (RDC) a opéré un virage budgétaire stratégique en adoptant une loi de finances rectificative pour 2025. Avec un budget révisé à 50 691,8 milliards de francs congolais (17,2 milliards USD), cette révision à la baisse de 1,7% par rapport au budget initial s’inscrit dans un contexte géopolitique et économique complexe. Comment ce « budget de combat » entend-il concilier sécurité nationale et stabilité macroéconomique ?
Le nouvel équilibre des comptes publics repose sur des projections audacieuses : croissance du PIB à 5,3%, inflation contenue à 8,8%, et un taux de change moyen fixé à 2 859,2 CDF/USD. La pression fiscale, révisée à la baisse de 15,1% à 12,5%, reflète une contraction des recettes courantes – un ajustement qui interroge sur la capacité à financer les ambitieuses priorités sociales.
Au cœur de cette restructuration, deux axes majeurs se dessinent. D’un côté, le renforcement des crédits alloués à la défense (+22% selon des sources internes) pour faire face à « l’agression rwandaise », selon les termes du ministre du Budget. De l’autre, un effort sans précédent de rationalisation du train de vie de l’État : réduction de 30% des dépenses de fonctionnement des institutions, selon des documents techniques consultés par notre rédaction.
Cette cure d’austérité s’accompagne paradoxalement d’investissements sociaux ciblés. La gratuité de l’enseignement et la couverture santé universelle absorbent à elles seules 18% du budget révisé. Le Programme de Développement Local (PDL-145T), véritable colonne vertébrale de la diversification économique, voit son enveloppe augmenter de 12%, selon des données officielles.
L’architecture financière du budget s’appuie sur un soutien international crucial : 165,4 millions USD d’appui budgétaire de la Banque mondiale et 266,7 millions USD attendus du FMI dans le cadre du programme Facilité de Crédit Élargi (FEC). Ces injections représenteront 15% du financement du déficit d’investissement, selon les projections du ministère des Finances.
« Cette révision n’est pas un repli, mais une réallocation tactique », analyse un expert économique sous couvert d’anonymat. « En réduisant la pression fiscale tout en maintenant l’équilibre budgétaire, Kinshasa tente de stimuler l’activité économique tout en satisfaisant les conditionnalités de ses bailleurs. »
La soutenabilité de ce fragile équilibre dépendra de la matérialisation des prévisions. Une croissance à 5,3% supposerait un rebond significatif du secteur minier (+8% selon les estimations) et agricole (+4,5%). Le défi reste entier : comment préserver le pouvoir d’achat dans un contexte inflationniste mondial persistants ?
À l’horizon 2025, ce budget rectificatif dessine les contours d’une économie de guerre adaptative. Si les engagements sociaux et sécuritaires sont tenus, la RDC pourrait maintenir son cap vers une croissance inclusive. Mais l’équation reste périlleuse : concilier rigueur budgétaire et urgences humanitaires dans un environnement régional instable.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd