Quatre cents bus du programme « Esprit de vie », symbole des ambitions gouvernementales en matière de mobilité urbaine à Kinshasa, croupissent depuis 2023 au port de Matadi. Un immobilisme coûteux qui interroge sur la capacité de l’État congolais à concrétiser ses promesses de modernisation des transports publics.
Selon Sylva Lemba Kisindu, coordonnateur du projet, le blocage persiste malgré l’urgence : « C’est l’État congolais qui a commandé ce lot. Il lui revient de régler les frais de transport depuis la Corée et les frais d’entreposage à Matadi ». Une facture invisible mais lourde, devenue pierre d’achoppement d’un programme pourtant vital pour une capitale étouffée par ses embouteillages chroniques.
Ironie du sort, cette paralysie contraste avec le discours officiel. En avril 2025, Jean-Pierre Bemba, vice-Premier ministre chargé des Transports, avait pourtant assuré que « dans les jours qui viennent, vous aurez vos 400 bus ». Trois mois plus tard, les véhicules dorment toujours sous le soleil du Kongo-Central, tandis que les factures s’empilent entre Transports et Finances.
Rappelons que l’« Esprit de vie », lancé en 2014 via un partenariat avec l’APVECO, visait à remplacer les mythiques Mercedes 207 – surnommées « esprit de mort » pour leur bilan accidentogène – par des minibus Hyundai neufs. Objectif affiché : réduire de moitié la mortalité routière tout désengorgeant Kinshasa. Mais entre les 250 premiers véhicules livrés et ce second lot, le tempo s’est perdu.
Ce retard cristallise un malaise plus profond. Comment expliquer qu’un programme prioritaire, doté d’un budget initial de 22,8 millions USD, reste otage de querelles interministérielles ? Les observateurs pointent une gouvernance en dents de scie, où chaque nouvelle initiative semble condamnée à être ballotée entre les promesses électorales et les réalités bureaucratiques.
Reste que chaque jour perdu alourdit la facture – littéralement. Les frais de stockage au port de Matadi grèvent un budget déjà tendu, tandis que Kinshasa continue de compter ses morts sur des routes anarchiques. Le gouvernement parviendra-t-il à sortir de cette ornière avant que « l’esprit de vie » ne se transforme en symbole d’opportunités gâchées ? La balle est dans le camp des Finances… et la crédibilité de l’exécutif dans la balance.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net