La République Démocratique du Congo (RDC), détentrice de l’un des plus vastes gisements de lithium au monde, se retrouve au cœur d’une équation économique et géopolitique complexe. Avec des réserves estimées à plusieurs millions de tonnes dans le territoire de Manono, cette richesse souterraine pourrait propulser le pays dans l’ère des énergies vertes. Mais entre convoitises internationales, opacité des contrats et attentes sociales déçues, le tableau révèle des fissures inquiétantes.
Un pactole sous tension géopolitique
Le lithium, métal stratégique pour les batteries électriques, place la RDC sur la carte des négociations mondiales. L’accord minier RDC États-Unis, évoqué sous l’ère Trump, illustre cet enjeu : Washington chercherait à sécuriser son approvisionnement face à la domination chinoise. Pourtant, malgré des projections prometteuses – le secteur pourrait générer 15% du PIB national d’ici 2030 selon la Banque mondiale –, le Tanganyika reste englué dans les paradoxes.
Corruption et asymétrie financière : l’ombre sur le contrat Zijin
L’octroi controversé du permis d’exploitation à Zijin Mining cristallise les tensions. Le géant chinois aurait versé 70 millions USD à une ONG privée, contre seulement 30 millions pour l’État congolais. « Cette disproportion interroge sur le respect du code minier révisé en 2018 », souligne un expert de Resource Matters sous couvert d’anonymat. Une configuration qui alimente les soupçons de corruption dans les mines RDC, tandis que Manono, épicentre de ce potentiel boom, voit toujours ses routes défoncées et ses écoles surpeuplées.
Attentes locales vs réalité économique
« On nous parle de révolution verte, mais nous vivons dans le noir », lance un habitant de Manono, où seulement 8% de la population a accès à l’électricité. Les promesses d’emplois – 5 000 postes annoncés – restent lettre morte, l’exploitation n’ayant pas démarré. Pire : l’inflation galopante (+23% sur les denrées de base en 2023) frappe une province où 72% des jeunes sont au chômage.
Quel avenir pour le lithium congolais ?
La RDC parviendra-t-elle à transformer son sous-sol en levier de développement ? Tout dépendra de la gouvernance. Si le pays appliquait strictement son code minier – 10% des actions réservées à l’État, 0,3% de chiffre d’affaires reversés aux communautés –, les recettes annuelles pourraient atteindre 200 millions USD. Mais sans transparence sur les contrats et lutte accrue contre les détournements, le scénario risque de répéter l’échec du cuivre ou du cobalt. L’administration Tshisekedi joue désormais sa crédibilité : le lithium sera-t-il un tremplin… ou un nouveau miroir aux alouettes ?
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd