Le Mécanisme national de suivi de l’Accord d’Addis-Abeba a dévoilé, ce mardi 20 mai à Kinshasa, un rapport accablant sur les exactions commises par le groupe rebelle M23/AFC dans les villes de Goma et Bukavu entre janvier et avril derniers. Présenté lors d’une cérémonie solennelle au Musée national, ce document de plus de 100 pages détaille des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et des actes assimilés à un génocide, perpétrés sous occupation armée.
En présence du vice-Premier ministre de l’Intérieur et de son homologue de la Défense nationale, le coordonnateur du Mécanisme, Alphonse Ntumba Lwaba, a insisté sur la portée historique de cette analyse : « Ce témoignage fort vise à soutenir les victimes tout en constituant une base probante pour les procédures judiciaires nationales et internationales. » Une déclaration qui résonne comme un appel à la mobilisation face à l’impunité persistante dans l’Est de la RDC.
Le rapport, qualifié d’« outil essentiel » par la ministre des Droits humains, systématise les preuves recueillies sur le terrain. Il documente notamment les violences ciblées contre les civils, les déplacements forcés de population et les destructions d’infrastructures vitales. Des éléments cruciaux pour étayer le futur dossier que Kinshasa entend soumettre à la Cour pénale internationale (CPI) et autres instances compétentes.
Patrick Muyaya, ministre de la Communication, a dénoncé avec virulence « l’agression rwandaise » et les exactions de ses « supplétifs » du M23. Son intervention a mis en lumière le dilemme entre paix et justice : « Sacrifier l’une pour l’autre revient à autoriser la répétition des massacres », a-t-il martelé, exigeant une traduction rapide des auteurs devant les tribunaux.
Ce livre blanc révèle par ailleurs l’ampleur vertigineuse du conflit : 12 millions de victimes recensées en trois décennies dans l’Est congolais. Un chiffre qui interroge sur l’efficacité des mécanismes de protection internationaux. Comment expliquer que de tels massacres perdurent malgré les multiples alertes ? Le document pointe notamment la complexité des réseaux armés et les ingérences étrangères.
La prochaine étape consistera en la formalisation des requêtes judiciaires auprès de la CPI et du mécanisme d’experts des Nations unies. Reste à savoir si la communauté internationale, souvent accusée de complaisance, appuiera fermement ces démarches. Pour les victimes de Bukavu à Goma, ce rapport représente un fragile espoir : que la vérité des charniers accouche enfin d’une justice tangible.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net