La crise salariale qui secoue l’Office National des Transports (ONATRA) prend une tournure à la fois urgente et symbolique sous le gouvernement Suminwa. Ce mardi 20 mai 2025, l’intersyndicale de l’entreprise publique, menée par Armand Osase, a obtenu une audience auprès de la Première Ministre Judith Suminwa Tuluka. Entre promesses gouvernementales et réalité du terrain, le fossé reste palpable.
Sur la table des négociations : vingt-cinq mois d’arriérés de salaires cumulés entre 2024 et 2025. « La précarité est extrême », a martelé M. Osase, soulignant une « situation chaotique » pour les 5 000 agents actifs et retraités. Si le gouvernement avait apuré deux mois de dettes en décembre 2024 via le ministre du Budget, cette mesure apparaît aujourd’hui comme un sparadrap sur une jambe de bois. Les travailleurs, eux, attendent toujours l’effet concret des « dispositions prises » brandies comme un mantra par les autorités.
La relance du transport public, autre pilier du dossier, suscite autant d’espoirs que de scepticisme. Le projet de réactivation de l’axe ferroviaire Kinshasa-Matadi – colonne vertébrale économique à l’arrêt depuis des années – et la modernisation des taxis fluviaux visent clairement une relance multisectorielle. Mais comment croire à cette renaissance alors que les caisses de l’ONATRA peinent à honorer ses salariés ? La question, rhétorique, plane sur les engagements affichés.
Le discours d’Armand Osase traduit cette ambivalence. Tout en saluant « l’écoute » de la cheffe du gouvernement, il rappelle crûment que « les travailleurs n’ont plus de marge de manœuvre ». Un avertissement voilé à l’exécutif : les promesses non tenues pourraient enflammer une situation sociale déjà explosive. La réunion du 20 mai s’inscrit dans une séquence politique délicate pour Judith Suminwa, dont la crédibilité se joue sur sa capacité à concilier rigueur budgétaire et paix sociale.
En filigrane, c’est toute la stratégie de gouvernance qui est interrogée. Le pari de transformer l’ONATRA en société commerciale – initié sous la précédente législature – bute sur des contradictions structurelles. Peut-on réellement assainir les finances d’une entreprise tout en maintenant un service public vital pour Kinshasa et sa région ? Les « dispositions concrètes » évoquées par le syndicat devront trancher ce nœud gordien sous peine d’alimenter un cercle vicieux : dette salariale chronique, dégradation des infrastructures, perte de confiance des usagers.
Reste la question du calendrier. Alors que le gouvernement promet un « règlement progressif » des arriérés, les syndicats exigent un échéancier contraignant. La Prime Minister aura-t-elle les moyens de ses ambitions dans un contexte de restrictions budgétaires ? L’affaire ONATRA devient ainsi un test décisif pour la majorité Suminwa, coincée entre ses obligations sociales et les réalités économiques.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: primature.grouv.cd