Dans une province du Lualaba en pleine métamorphose, la visite de la Première Ministre Judith Suminwa Tuluka à Kolwezi révèle une stratégie gouvernementale à double détente : ancrer l’action publique dans le concret tout en consolidant son assiette politique. Entre inaugurations symboliques et promesses socio-économiques, ce périple dans le cœur minier de la RDC interroge autant qu’il impressionne.
Le nouveau bâtiment administratif provincial, fleuron de cette tournée, incarne cette volonté d’incarner un État modernisé. « Un cadre de travail digne pour des services publics efficaces », souligne la cheffe du gouvernement, omettant toutefois de préciser le calendrier de son opérationnalisation. À quelques encablures, l’hôtel du gouvernorat déploie son architecture ambitieuse – vitrine d’une province qui mise sur l’attractivité territoriale. Mais derrière les façades rutilantes, la question des retombées réelles pour la population persiste.
L’étape à l’hôpital Mwangeji permet à l’Exécutif de rappeler son engagement pour l’accès aux soins. « La santé n’est pas un privilège, mais un droit fondamental », martèle Suminwa Tuluka. Pourtant, le défi reste colossal dans une région où les infrastructures médicales peinent à suivre l’explosion démographique liée à l’activité minière.
Plus émouvante, la visite à l’orphelinat DNT révèle le visage social de cette diplomatie de terrain. En finançant des formations professionnelles pour les pupilles, le pouvoir central esquisse une réponse à la précarité juvénile. Une initiative saluée, mais qui soulève une interrogation : ces mesures palliatives suffiront-elles face à l’ampleur des besoins ?
Le clou du spectacle reste l’échangeur routier de Kolwezi, projet phare censé fluidifier le trafic des minerais et des personnes. Avec ses 2,5 km de bitume financés par le groupe Forrest, l’ouvrage symbolise les partenariats public-privé dans une province où l’exploitation minière rythme l’économie. « Une artère vitale pour notre développement », vante la gouverneure Fifi Masuka, sans évoquer les déplacements de population qu’il a impliqués.
En clôture, l’aéroport international de Lualaba sert de toile de fond à un discours sur la souveraineté nationale. « Même sous pression, la RDC bâtit son avenir », lance la Première Ministre, allusion transparente aux tensions dans l’Est. Message audacieux, alors que les bailleurs internationaux financent une partie de ces infrastructures.
Si cette visite marque un point d’étape dans les projets structurants, elle laisse en suspens plusieurs équations. Le modèle de développement promu, largement centré sur les partenariats miniers, saura-t-il créer une croissance inclusive ? Les nouvelles routes suffiront-elles à désenclaver des populations longtemps négligées ? Autant de défis qui conditionneront l’impact réel de ces investissements sur la stabilité du Lualaba – et par extension, sur celle du pays tout entier.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: primature.grouv.cd
