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Nord-Kivu : L’eau potable, un calvaire sous la menace des groupes armés

« Toutes les sources d’eau proches ont été volées ! » La colère de Mwami Bakora Shebihembe, chef du groupement Utunda, résume le drame quotidien de Ngora. Dans cette agglomération du territoire de Walikale (Nord-Kivu), chaque bidon d’eau potable s’arrache au prix d’une marche épuisante de deux kilomètres, sous la menace constante des groupes armés. Comment en est-on arrivé à faire de l’or bleu un luxe inaccessible dans cette région pourtant riche en cours d’eau ?

Derrière cette crise se cache une réalité glaçante : des hommes influents ont transformé les points d’eau en étangs piscicoles privés. « Nos enfants boivent la même eau que les poissons, sans traitement », soupire une mère de famille, montrant un bassin trouble où nagent des carpes. Le comble ? Ces étangs deviennent paradoxalement la seule alternative à une quête dangereuse. Car pour atteindre les sources « libres », il faut s’aventurer en forêt – territoire des miliciens.

« La dernière fois, ils ont pointé des armes sur nous en rigolant », raconte Julienne*, 34 ans, les mains tremblantes. Comme la majorité des femmes interrogées, elle préfère taire les détails de ces intimidations. Pour les maris, l’angoisse est double : protéger leurs épouses tout en assumant leurs travaux champêtres. « Maintenant, on alterne : un jour sur deux, j’accompagne ma femme au puits au lieu de cultiver », explique un agriculteur, la mine sombre.

Cette crise hydrique cache une bombe sanitaire à retardement. Le médecin-chef de l’hôpital de Walikale alerte : « 60% des consultations sont liées à des maladies hydriques. Sans réseau d’adduction, on va droit vers une catastrophe épidémique. » Pendant ce temps, le tank installé par une ONG ne suffit plus. « Quand il ne pleut pas pendant une semaine, c’est la guerre pour quelques gouttes », décrit un jeune père tenant son bidon vide.

Le chef Shebihembe lance un cri du cœur aux autorités : « Nous avons besoin d’un château d’eau, pas de promesses ! » Mais dans cette zone sous influence de groupes armés, quel opérateur osera investir ? La réponse vient peut-être des femmes de Ngora, qui organisent désormais des patrouilles collectives pour sécuriser le trajet vers les sources. Une résilience face à l’oubli, alors que le Nord-Kivu semble condamné à inventer chaque jour sa survie.

Cette crise pose une question cruciale : jusqu’à quand les populations civiles paieront-elles le prix de l’insécurité et des appropriations illicites des ressources ? Alors que la RDC ambitionne l’accès universel à l’eau potable d’ici 2030, Ngora illustre l’urgence d’actions concrètes. Car derrière chaque statistique se cachent des femmes héroïques, des enfants malades, et toute une communauté qui se bat pour un droit fondamental : boire sans risquer sa vie.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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