Dans un contexte marqué par des défis socio-économiques persistants, l’Assemblée provinciale de Kinshasa (APK) a adopté jeudi 15 mai 2025 un rapport ambitieux censé redéfinir les priorités d’action du gouvernement provincial. Ce document, fruit des travaux d’une commission spéciale, compile les doléances des citoyens recueillies pendant les vacances parlementaires de 2024. Mais derrière cette unanimité affichée, se cachent des enjeux politiques complexes qui pourraient déterminer l’avenir du mandat du gouverneur Daniel Bumba Lubaki.
André Nkongolo Nkongolo, rapporteur de l’APK, a détaillé cinq axes structurants : sécurité, infrastructures, éducation, environnement et santé. Des thématiques qui résonnent avec les préoccupations quotidiennes des Kinois, mais dont la mise en œuvre nécessitera une alchimie politique délicate. « La concrétisation exige […] un esprit de changement de l’état actuel de la situation calamiteuse », a-t-il averti, jetant un pavé dans la mare d’un exécutif souvent accusé de laxisme.
Sur le front sécuritaire, les recommandations parlent d’augmenter les effectifs policiers et de sanctionner les éléments fautifs. Une proposition qui interroge : les moyens existants suffiront-ils à endiguer un banditisme urbain nourri par le chômage massif ? L’insistance sur les permutations policières laisse quant à elle entrevoir des pratiques clientélistes ancrées au sein des forces de l’ordre.
Le volet infrastructurel n’est pas moins ambitieux, avec la réhabilitation des routes et la construction de collecteurs d’eau. Ces projets pharaoniques soulèvent cependant des questions de financement dans une province où la gestion des fonds publics reste opacifiée. L’Opération Salongo, relancée pour combattre l’insalubrité, rappelle étrangement les campagnes symboliques des années passées – brillantes dans les discours, mais souvent décevantes sur le terrain.
L’éducation et la santé, parents pauvres des politiques publiques, bénéficient d’une attention inédite dans le rapport. La construction de nouvelles écoles et centres de santé répond à une urgence sociale criante. Reste à savoir si ces engagements résisteront à la réalité budgétaire d’une administration provinciale régulièrement épinglée pour ses retards dans le paiement des fonctionnaires.
Au-delà des bonnes intentions affichées, ce rapport dessine en creux les tensions entre législatif et exécutif. En brandissant l’article 143 du règlement intérieur, l’APK assoit son rôle de contre-pouvoir. Mais cette démonstration de force institutionnelle masque-t-elle une tentative de capter une part du budget provincial ? Le calendrier politique – à moins de deux ans des prochaines élections – invite à une lecture stratégique de ces recommandations.
La balle est désormais dans le camp du gouverneur Lubaki. Ses choix dans les prochains mois détermineront non seulement l’efficacité de ces mesures, mais aussi l’équilibre des pouvoirs à Kinshasa. Entre populisme électoral et réformes structurelles, la marge de manœuvre semble étroite. Une chose est sûre : les Kinois, habitués aux promesses non tenues, attendront des actes concrets avant de crier victoire.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd