La terre se dérobe littéralement sous les pieds des habitants de Kwamouth. Dans cette cité stratégique de la province du Maï-Ndombe, l’érosion hydrique ronge jusqu’à 5 mètres de terrain par an selon des estimations locales. Un phénomène qui met désormais en sursis direct la Direction générale des impôts, la Force navale et près de 200 habitations. « Notre commune vit sous la menace d’un glissement de terrain généralisé », alerte le député provincial David Bisaka, la voix chargée d’une urgence palpable.
Comment en est-on arrivé là ? La réponse se niche dans un cocktail détonant de facteurs naturels et d’inertie politique. Kwamouth, située à la confluence du fleuve Congo et de la rivière Kasaï, paie cash sa position géographique. Les sols sablonneux caractéristiques de la zone cèdent comme un château de cartes sous l’assaut des pluies diluviennes et des crues saisonnières. « Chaque averse creuse un peu plus les ravins qui menacent nos infrastructures vitales », décrypte un ingénieur environnemental sous couvert d’anonymat.
Les conséquences ? Un exode silencieux de populations fuyant les maisons fissurées, des axes routiers transformés en canyons impraticables, et surtout une bombe à retardement pour l’économie locale. La Régie provinciale des recettes, véritable poumon financier de la région, voit ses fondations grignotées jour après jour. « Si ce bâtiment s’effondre, c’est tout le système de collecte des taxes qui s’écroule avec », prévient David Bisaka, martelant l’urgence d’une intervention étatique.
Face à cette crise environnementale en RDC, les solutions existent pourtant. Des techniques éprouvées comme les enrochements, les plantations anti-érosives ou les drains d’évacuation des eaux pourraient stopper l’hémorragie. Mais leur mise en œuvre se heurte à un manque criant de moyens et de volonté politique. « Nous avons soumis trois projets d’aménagement depuis 2022. Aucune suite concrète », déplore le député de Kwamouth, les yeux rivés sur les berges déchiquetées du fleuve Congo.
Cette inertie pourrait coûter cher. Les spécialistes redoutent un effet domino : l’effondrement des infrastructures menacées en RDC provoquerait non seulement une crise humanitaire, mais accentuerait la sédimentation du fleuve Congo. Un scénario catastrophe pour la navigation fluviale et l’équilibre écologique du bassin du Congo. La boucle est vicieuse : chaque structure emportée par les eaux accélère l’érosion des berges voisines.
Alors que les inondations au Mai-Ndombe battent des records cette saison, Kwamouth devient le symbole d’une double urgence : protéger les populations et préserver le fleuve Congo, artère vitale de la région. Le temps presse. Chaque jour perdu se mesure en mètres carrés de territoire engloutis. La nature, ici, n’attend pas les lenteurs administratives.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: Actualite.cd