Dans un contexte où la professionnalisation des services publics constitue un enjeu majeur pour la RDC, un partenariat stratégique vient de voir le jour. L’École nationale d’administration (ENA) et la Caisse nationale de péréquation ont officialisé jeudi 15 mai à Kinshasa un protocole visant à former 400 agents et cadres. Une initiative qui interroge : comment transformer concrètement les promesses de réforme en résultats tangibles pour l’administration congolaise ?
Conformément aux termes de l’accord, les formations couvriront plusieurs modules de gestion essentiels, allant de la gouvernance financière aux méthodes modernes d’administration publique. « Cette collaboration s’inscrit dans notre mission sociale de renforcement des compétences des agents de l’État », a souligné Tombola Muke, directeur général de l’ENA. Une déclaration qui résonne avec les priorités fixées par le vice-Premier ministre chargé de la Fonction publique, notamment en matière d’accompagnement institutionnel.
Mais pourquoi ce partenariat fait-il figure de tournant ? La réponse se niche dans les défis structurels du pays. La Caisse nationale de péréquation, chargée par l’article 181 de la Constitution de corriger les déséquilibres de développement entre provinces, a longtemps pâti d’un manque de moyens humains qualifiés. « Ces formations nous permettront de gagner la confiance du gouvernement pour le déblocage des fonds », explique Coco-Jacques Mulongo, directeur général de l’institution financière publique.
Derrière les discours officiels se profile une réalité économique cruciale : sans agents formés aux normes internationales, comment garantir une répartition efficace des ressources entre les 26 provinces ? Les modules prévus intègrent justement des cas pratiques sur la gestion des fonds de péréquation, ces instruments clés pour le développement territorial décentralisé.
Certains observateurs soulignent toutefois que l’enjeu dépasse la simple formation technique. « C’est toute la culture administrative qu’il faut faire évoluer », confie un enseignant de l’ENA sous couvert d’anonymat. Les participants devront notamment travailler sur des simulations budgétaires concrètes, calquées sur les réalités socio-économiques des provinces minières et agricoles.
Reste la question du financement, épine dorsale de toute réforme en RDC. Si la Caisse nationale de péréquation voit dans cet accord un levier pour sécuriser ses ressources, les détails opérationnels restent à préciser. Le calendrier des formations – qui doivent démarrer dans les prochaines semaines – et les mécanismes de suivi constitueront des tests décisifs pour ce partenariat inédit.
À l’heure où les provinces réclament une plus grande autonomie de gestion, cette initiative pourrait marquer un premier pas vers une administration territoriale plus performante. Mais sa réussite dépendra d’un alignement parfait entre renforcement des capacités, volonté politique et allocation effective des moyens financiers. Le développement à la base, mantra constitutionnel, trouvera-t-il enfin sa traduction concrète ?
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net