La République Démocratique du Congo semble enfin prête à tourner la page d’une décennie de tergiversations technologiques. Sous l’impulsion du ministre de la Communication et des Médias, Patrick Muyaya, le Comité national de la migration vers la télévision numérique terrestre (CNM-TNT) a enclenché une phase opérationnelle lors de sa première session extraordinaire. Un timing serré qui interroge : simple effet d’annonce ou véritable accélérateur pour rattraper le retard accumulé depuis 2015 ?
Le choix d’un marché de gré à gré avec un prestataire qualifié, présenté comme une solution d’urgence, soulève des questions sur les mécanismes de transparence. « Nous avons presque finalisé toutes les procédures nécessaires », a assuré M. Muyaya, en tandem avec le ministre d’État chargé du Budget. Une formulation qui, sous couvert de technocratie, évite soigneusement de nommer le partenaire stratégique – détail qui n’échappera pas aux observateurs aguerris des marchés publics.
La référence appuyée au président Tshisekedi, désireux de « rendre la télévision accessible à tous les Congolais », apparaît comme un habile levier politique. Ce projet, présenté comme un impératif d’équité sociale, sert surtout à masquer l’échec persistant des précédentes administrations. L’engagement envers l’Union internationale des télécommunications sonne comme un aveu : la RDC joue son crédit technologique sur la scène internationale.
Derrière les déclarations optimistes se cachent des défis logistiques colossaux. Comment concilier couverture nationale et « tarifs abordables » dans un pays aux infrastructures électriques défaillantes ? La composition pluriministerielle du comité – Défense, Justice, Finances – laisse entrevoir une opération moins technique que géostratégique. Le PTN et l’Industrie en sentinelles : preuve que cette migration dépasse le simple enjeu médiatique.
L’annonce d’une campagne de sensibilisation imminentevient rappeler que le véritable obstacle reste l’adhésion populaire. Après des années de flou, les ménages congolais devront-ils supporter le coût des décodeurs ? Patrick Muyaya botte en touche, promettant des « informations précises dans les jours à venir ». Un suspense malgré tout peu télégénique…
Ce déploiement express, s’il aboutit, pourrait redessiner l’échiquier médiatique national. Mais gare aux raccourcis : en politique comme en technologie, les transitions forcées génèrent souvent des bugs de gouvernance. La TNT deviendra-t-elle le cheval de Troie d’une régulation accrue des contenus ? L’avenir numérique du Congo s’écrit maintenant – avec ou sans signal clair.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Eventsrdc
