Dans l’enceinte vibrante du Centre Culturel et Artistique pour les Pays d’Afrique Centrale (CCAPAC) de Kinshasa, une alchimie singulière s’est opérée samedi 10 mai. Sous les projecteurs du premier Festival du Film Ya Kelasi (Fefik), l’audace créative des élèves congolais a redessiné les contours du cinéma scolaire, transformant l’écran en miroir des réalités culturelles et sociales du pays.
Dès l’aube, l’effervescence était palpable. Entre les murs du CCAPAC, berceau des arts kinois, des rires adolescents se mêlaient au crépitement des caméras. Quatre établissements scolaires – le CE Mboloko Les Gazelles, le Collège Saint Étienne, l’Institut Notre-Dame de Fatima et le Collège Sainte Marie Goretti – ont livré une joute cinématographique où chaque plan devenait manifeste. Leurs courts métrages, véritables kaléidoscopes narratifs, ont oscillé entre héritage ancestral et urgences contemporaines, prouvant que la jeunesse congolaise possède son propre langage pour dire le monde.
La cérémonie d’ouverture a déployé une symphonie de couleurs et de rythmes : danses traditionnelles revisitées, slams percutants, regards brillants d’adolescents découvrant leur œuvre sur grand écran. « Masque aux deux visages », le film primé du CE Mboloko Les Gazelles, a particulièrement marqué les esprits par son habile dialogue entre traditions et modernité. Comment, semble-t-il demander, porter un héritage culturel sans en devenir prisonnier ?
Christian Deka, directeur technique du Fefik, esquisse une philosophie : « Ce festival n’est pas une vitrine, mais un carrefour. Ici, les récits scolaires deviennent paraboles nationales. » Une vision que partage le professeur Balufu Bakupa Kanyinda, directeur général du CCAPAC, annonçant un cycle de projections dominicales pour pérenniser cet élan. Et si ces écrans devenaient les nouveaux griots urbains ?
Derrière les trophées remis aux jeunes cinéastes en herbe, c’est toute une génération qui s’empare des outils numériques pour réinventer la transmission. Les films primés, véritables palimpsestes visuels, ont su mêler critique sociale et poésie quotidienne – des cours d’école aux marchés populaires, chaque décor devenant personnage à part entière.
Avec cette première édition, le Festival Ya Kelasi pose les jalons d’une révolution culturelle silencieuse. En faisant du septième art un outil pédagogique et identitaire, il ouvre une brèche où l’imaginaire collectif congolais peut se réinventer, plan après plan. La jeunesse kinoise, caméra au poing, écrit désormais sa propre légende – et quel scénario pourrait être plus captivant ?
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd