Dans un geste chargé de symbolisme politique, le Mouvement Congo en Avant (MCA) a choisi ce samedi 10 mai 2025 pour célébrer l’héritage controversé de Jules Alingete Key, ancien inspecteur général des Finances. À travers un hommage appuyé, ce parti d’opposition – ou d’opportunité ? – tente de réécrire l’histoire récente des finances publiques en RDC, tout en dessinant subtilement les contours de sa propre stratégie.
Durant cinq ans, Jules Alingete Key a dirigé l’Inspection Générale des Finances (IGF) avec une rigueur qui fit trembler les cercles du pouvoir. Le MCA salue une « œuvre monumentale » ayant « fait reculer les frontières de la corruption ». Mais derrière cette louange se cache une réalité plus complexe : chaque rapport publié sous son mandat déchirait le voile pudique sur des détournements impliquant jusqu’aux plus hautes sphères de l’État. « Aucun rang, aucun régime n’a été épargné », rappelle la déclaration du parti. Une impartialité explosive qui transforma l’IGF en épée de Damoclès suspendue au-dessus d’une classe politique accrochée à ses privilèges.
La proposition de rebaptiser l’avenue du Haut-Commandement en l’honneur du contrôleur sortant suscite cependant des interrogations. Simple manœuvre d’affichage politique ou véritable volonté de sanctuariser l’anti-corruption ? En suggérant au président de la République ce geste mémoriel, le MCA place habilement ses pions sur l’échiquier des réformes institutionnelles. Cette artère symbolique, siège de l’IGF, deviendrait ainsi le théâtre d’une bataille sémantique où se joue la mémoire des luttes contre la prédation financière.
L’appel à la nouvelle équipe de l’IGF sonne comme un avertissement voilé : « Poursuivre avec la même ardeur, voire surpasser » les actions passées. Un challenge périlleux dans un pays où chaque changement à la tête des institutions de contrôle s’apparente à un recrutement de pyromanes pour éteindre un incendie. Le MCA, se présentant en gardien vigilant, promet une détermination « encore plus forte » contre les « fossoyeurs du trésor public ». Mais jusqu’où ira cette croisade dans un contexte où les partis politiques naviguent souvent entre dénonciation et compromission ?
Cette opération de communication révèle les tensions sous-jacentes du paysage politique congolais. En canonisant un fonctionnaire intègre, le Mouvement Congo en Avant tente de s’approprier le capital symbolique de la lutte anti-corruption. Stratégie payante ou calcul à courte vue ? La réponse se niche peut-être dans les réactions contrastées que Jules Alingete Key lui-même provoquait : respect craintif d’un côté, rancœur tenace de l’autre. L’avenir dira si cette tentative de réhabilitation historique résistera aux prochains scandales financiers – inévitables – qui secoueront le pays.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: mediacongo.net
