Dans un contexte international marqué par des turbulences économiques, la République Démocratique du Congo affiche une résilience macroéconomique surprenante. Lors du Comité de conjoncture économique du 7 mai 2025, le gouvernement a révélé une stabilité des indicateurs clés : inflation maîtrisée, taux de change stabilisé et croissance soutenue à 5,2% sur le premier trimestre. Mais comment cette performance se traduit-elle concrètement dans les marchés de Kinshasa ou les villages du Kasaï ?
Le Vice-Premier Ministre de l’Économie nationale, le professeur Mukoko Samba, a dévoilé les mécanismes de cette stabilité. “Notre politique de régulation monétaire stricte combinée à un contrôle accru des dépenses publiques a permis d’absorber les chocs externes”, précise-t-il. La Banque Centrale du Congo maintient ses taux directeurs à 9,5%, une stratégie qui a contenu l’inflation à 8,3% sur un an, selon les dernières statistiques officielles.
Cette rigueur budgétaire cache cependant une réalité contrastée. Si les macro-indicateurs brillent au vert, le panier de la ménagère kinoise continue de se rétrécir. Le prix du sac de maïs a grimpé de 12% depuis janvier 2025, atteignant 55 000 FC sur les marchés de la capitale. Un paradoxe que le gouvernement entend résoudre via son « compact de résilience », un plan d’urgence doté d’une enveloppe initiale de 500 millions USD.
Kinshasa en première ligne : mobilité et assainissement au cœur du plan
La mégapole de 17 millions d’habitants bénéficiera de 40% des investissements prévus. Principal défi : désengorger les 120 km d’embouteillages quotidiens qui coûtent 1,5% de PIB annuel selon la Banque Mondiale. “Nous lancerons d’ici septembre 2025 un système de transport fluvial sur le Congo pouvant transporter 50 000 passagers/jour”, annonce un membre du cabinet ministériel sous couvert d’anonymat.
Ce projet s’accompagnera de la réhabilitation de 200 km de voiries urbaines et de la construction de trois centres de traitement des déchets d’une capacité totale de 3 000 tonnes/jour. Un effort nécessaire pour une ville qui génère actuellement 8 500 tonnes de déchets quotidiens, dont seulement 15% sont collectés.
Sécurité alimentaire : le triangle maïs-riz-volaille comme priorité nationale
Le volet agricole du compact mise sur une augmentation de 30% de la production céréalière d’ici 2027. Objectif chiffré : atteindre 4 millions de tonnes de maïs et 1,2 million de tonnes de riz grâce à un programme de subventions aux intrants agricoles. La filière avicole recevra quant à elle 75 millions USD pour développer des fermes modèles dans les 26 provinces.
Cette stratégie s’appuie sur le PDL-145T, le programme phare du Président Tshisekedi. “En connectant 200 zones rurales au réseau routier national d’ici fin 2026, nous réduirons de moitié les pertes post-récoltes”, explique un expert du Ministère de l’Agriculture. Actuellement, 40% de la production agricole se gâtent avant d’atteindre les marchés, un gaspillage évalué à 800 millions USD annuels.
Les défis d’une croissance inclusive
Si les ambitions gouvernementales sont louables, leur financement interroge. Le budget global du compact représente 15% du PIB 2024, nécessitant un recours accru à l’endettement. La dette publique pourrait ainsi frôler les 65% du PIB d’ici 2026, selon des projections internes de la BCC.
Autre écueil : la coordination interministérielle. Pas moins de huit ministères sont impliqués dans ce plan, soulignant la nécessité d’une gouvernance unifiée. La nomination prochaine d’un coordonnateur national devrait pallier ce risque, selon des sources gouvernementales.
Reste que l’urgence sociale impose des résultats rapides. Avec 73% de la population vivant sous le seuil de pauvreté et un indice de développement humain classé 179e sur 191 par l’ONU, la RDC ne peut se permettre des retards dans l’exécution de ce compact. Les prochains mois seront décisifs pour transformer les engagements en réalisations tangibles.
Article Ecrit par Amissi G
Source: primature.grouv.cd