La ville de Beni, au cœur du Nord-Kivu, suffoque sous le poids de ses propres rebuts. Chaque jour, des tonnes de déchets ménagers s’entassent dans les artères de la cité, transformant les paysages urbains en dépotoirs à ciel ouvert. Face à cette urgence écologique, le service urbain de l’environnement lance un cri d’alarme : « Emballez vos déchets et exposez-les devant vos portes ! ». Une mesure radicale qui soulève autant d’espoirs que de questions brûlantes.
Un Salongo à l’assaut des montagnes d’ordures
Moïse Adirodu, chef du service environnemental, brandit son plan comme un ultimatum. « Le Salongo n’est plus optionnel », assène-t-il. Les ménages sont sommés de conditionner leurs détritus dans des sacs visibles, prêts pour la collecte chaque samedi. Objectif affiché : exploiter les travaux communautaires pour désengorger une ville où 65% des déchets finissent dans la nature selon les estimations locales.
Mavivi : Le nouveau cimetière des déchets de Beni
Le dépotoir de Nzuma à Mavivi devient le symbole de cette bataille écologique. « Ce site doit absorber notre crise », explique Adirodu, les yeux rivés sur les camions de ramassage. Mais derrière l’optimisme officiel, un dilemme persiste : comment transformer des décennies d’habitudes polluantes en gestes civiques ?
Plastique : Le poison qui résiste au Salongo
Les bouteilles en PET hantent les discours des autorités. « Un fléau qui survivra à nos petits-enfants », tonne le responsable environnemental. Chiffre choc : 80 ans. C’est le temps nécessaire à la dégradation d’une simple bouteille plastique. La consigne est claire : ramener ces « assassins silencieux » chez soi plutôt que de les abandonner dans les caniveaux.
Des camions à l’assaut des avenues rebelles
Les grands axes urbains deviennent le champ clos d’une guerre contre l’insalubrité. Un véhicule dédié par commune, affirme-t-on, pour traquer déchets solides, liquides et gazeux. Mais les riverains doutent : « Comment ces engins franchiront-ils les nids-de-poule et les embouteillages chroniques ? », s’interroge une commerçante du quartier Ngadi.
L’écologie au prix du civisme
Cette croisade environnementale cache un pari sociétal. Peut-on imposer une discipline collective dans une région minée par les conflits ? Les autorités misent sur le Salongo, ce rituel hérité de l’ère mobutiste, pour réveiller les consciences. Mais le défi dépasse la simple gestion des ordures : il s’agit de réinventer le contrat entre citoyens et environnement dans une zone en crise permanente.
L’avenir dira si Beni parviendra à transformer ses sacs-poubelles en étendards d’une révolution écologique. Une certitude s’impose : chaque bouteille ramassée, chaque sac correctement trié, écrit une page nouvelle de la résilience urbaine congolaise. La ville respire-t-elle déjà mieux ? Les prochains Salongo apporteront leur verdict.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net