Dans le quartier populaire de Bisengo, à Bandalungwa, la pluie du 1er mai a transformé des vies en cauchemar. « Nous dormons comme des animaux ici. L’eau a tout emporté : nos matelas, nos souvenirs… », témoigne Mama Esther, mère de cinq enfants, devant les décombres de sa maison effondrée. Comme des centaines d’autres familles, elle survit désormais entre gravats et flaques putrides, symbole criant d’une crise humanitaire qui interroge la gestion urbaine de Kinshasa.
Le tableau est apocalyptique sur l’avenue Kasa-Vubu. Des caniveaux transformés en torrents de déchets, des maisons lézardées par les eaux, des commerçants pataugeant dans la boue pour récupérer leurs marchandises. « Regardez ces enfants qui jouent dans l’eau sale ! », s’indigne un enseignant local. « Demain, ce seront des cas de choléra à l’hôpital. Mais qui prend nos vies en compte ? »
La colère gronde contre les autorités accusées de négligence. « Ils ont construit des caniveaux en carton ! », lance un jeune homme en montrant des conduites ensevelies sous des monticules de plastique. Le problème des inondations récurrentes à Bandalungwa révèle une réalité plus sombre : l’urbanisation anarchique et la gestion approximative des déchets. Chaque année, 1,2 million de tonnes de détritus envahissent les artères de Kinshasa selon le ministère de l’Environnement – un chiffre qui prend ici tout son sens tragique.
Les conséquences sanitaires alarment les médecins. « Les infections cutanées ont triplé depuis deux mois », alerte une infirmière du centre CBCO voisin. Dans ce quartier où 70% des habitants vivent avec moins de 2$ par jour, la double peine économique et sanitaire frappe fort. « Ma boutique est sous l’eau depuis une semaine », se lamente un vendeur de téléphones portables. « Comment nourrir ma famille maintenant ? »
Derrière le drame immédiat se profile une bombe écologique à retardement. Les eaux stagnantes menacent les nappes phréatiques tandis que les déchets plastique s’accumulent. « Avant, on avait des espaces verts pour absorber les pluies », soupire un ancien du quartier. « Maintenant, le béton a tout remplacé. » Un constat qui renvoie à l’urgence d’une politique d’aménagement cohérente dans la capitale congolaise.
Alors que la saison des pluies s’installe, la question brûle les lèvres : Bandalungwa est-elle condamnée à revivre ce scénario chaque année ? Entre l’impératif de drainage urgent et le besoin crucial de sensibilisation citoyenne, les solutions existent. Mais pour combien de temps encore les habitants devront-ils compter sur leur seule résilience face aux éléments déchaînés ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net