Une action judiciaire collective se prépare contre la SNEL pour « carences répétées »
La Nouvelle Société Civile Congolaise (NSCC) a initié, ce lundi 5 mai, une procédure inédite visant à constituer un recours collectif contre la Société nationale d’électricité (SNEL). Cette démarche, annoncée lors d’une conférence de presse à Kinshasa, fait suite à des années de doléances non résolues concernant la qualité du service énergétique dans la capitale.
Un registre des plaintes pour consolider le dossier
Jonas Tshiombela, coordonnateur de la NSCC, a détaillé les mécanismes de cette action : « Un registre officiel est ouvert pour recenser toutes les victimes des défaillances systémiques de la SNEL. Chaque coupure non justifiée, chaque facture contestable, chaque préjudice subi doit y être consigné avec précision. » Cette collecte méthodique, supervisée par des juristes, servira de base à une requête en responsabilité civile contre l’entreprise publique et ses partenaires institutionnels.
Le paradoxe d’un service payant mais absent
Les griefs formulés révèlent un paradoxe alarmant : malgré des paiements mensuels réguliers, près de 65% des quartiers kinois subiraient des interruptions de courant excédant 72 heures consécutives. Le système de prépaiement, présenté comme une solution, est lui-même mis en cause. « Des abonnés créditent leurs comptes sans pouvoir consommer l’énergie achetée, transformant la SNEL en créancier sans contrepartie », dénonce un habitant de Kintambo joint par nos soins.
Une facturation contestée sur fond d’obscurité publique
Le point d’achoppement majeur réside dans la perception continue d’une taxe d’éclairage public (1% des factures), alors que 80% des artères de Kinshasa resteraient plongées dans l’obscurité après 18h. « Comment justifier ce prélèvement quand les lampadaires ne fonctionnent plus depuis des mois ? », interroge Me Gabrielle Mbuyi, avocate associée au dossier. Cette question, récurrente dans les consultations publiques, alimente les suspicions de détournement de fonds affectés.
La SNEL face à ses contradictions
Si la société civile reconnaît les défis structurels – vétusté du réseau datant pour certains tronçons de l’époque coloniale, pillages récurrents de câbles, dettes accumulées par des institutions étatiques – elle rejette toute tentative de justification. « Une entreprise qui facture 8 millions de MWh aux sociétés minières ne peut arguer d’un manque de ressources pour moderniser ses infrastructures », assène Jonas Tshiombela.
Vers un précédent judiciaire en droit des consommateurs ?
L’originalité de cette action réside dans son ancrage communautaire. En mobilisant simultanément le droit administratif (pour manquement au service public) et le droit commercial (pour non-respect des contrats d’abonnement), la NSCC espère créer un jurisprudent utile. Les prochaines semaines seront cruciales : le parquet de Kinshasa-Gombe devra se prononcer sur la recevabilité du recours collectif, une première dans le contentieux énergétique congolais.
Silence radio du côté de la SNEL
Malgré nos multiples sollicitations, la direction générale de la SNEL n’a fourni aucune réaction officielle. Seule une source interne, sous couvert d’anonymat, a concédé : « Certaines critiques sont fondées, mais les solutions dépassent notre champ d’action. » Une position qui risque de renforcer l’argumentaire des plaignants quant à la nécessité d’impliquer d’autres responsables institutionnels dans la procédure.
Les consultations publiques se poursuivront jusqu’au 25 mai, date à laquelle le cabinet Betu & Associés déposera officiellement la requête introductive d’instance. L’affaire pourrait marquer un tournant dans les relations entre usagers et entreprises publiques en RDC.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net