La zone de santé de Rethy, dans le territoire de Djugu en Ituri, fait face à une résurgence inquiétante de la peste, avec plus de 20 cas signalés fin avril. Parmi ces cas, 23 patients présentent la forme bubonique de la maladie, tandis que deux autres souffrent de la variante pulmonaire, plus contagieuse et potentiellement mortelle. Comment une maladie médiévale refait-elle surface en 2024, et que faut-il savoir pour s’en protéger ?
D’après les autorités sanitaires locales, cette flambée coïncide avec le retour des pluies, période propice à la prolifération des rongeurs – principaux réservoirs de la bactérie Yersinia pestis. Les symptômes décrits sont alarmants : toux avec crachats sanglants, fièvre fulgurante dépassant 39°C, douleurs thoraciques comparables à « une lame plantée dans les côtes », selon le témoignage d’un soignant relayé dans le rapport officiel.
La peste pulmonaire, transmissible par simple gouttelette respiratoire, représente un défi majeur de santé publique. Un seul malade non isolé peut contaminer des dizaines de personnes en quelques jours. Pourquoi cette forme rare représente-t-elle 8% des cas actuels ? Les experts évoquent des retards de diagnostic initiaux, la forme bubonique (transmise par piqûres de puces infectées) ayant parfois évolué vers la version respiratoire.
Face à cette urgence, les mesures préventives s’imposent. Les autorités interdisent formellement la consommation de viande de rongeurs, véritables « bombes bactériennes ambulantes ». Le lavage des mains au savon et la désinfection des habitations sont cruciaux. « Un environnement propre est un bouclier contre la peste », insiste un responsable de la protection civile contacté par nos soins.
La société civile locale alerte sur un risque méconnu : la manipulation des défunts. Les rites funéraires traditionnels exposent les familles à un contact direct avec des corps hautement contaminants. Une mise en garde particulière concerne aussi les voyageurs. Le trafic routier entre Rethy et Kisangani pourrait transformer des camions en « taxis de la peste » vers d’autres provinces si les contrôles sanitaires ne sont pas renforcés.
Des équipes médicales mobiles ont été déployées pour dépister précocement les nouveaux cas. Les traitements antibiotiques (doxycycline, ciprofloxacine) restent efficaces s’ils sont administrés dans les 24 premières heures. Mais dans ces zones reculées de l’Ituri, l’accès aux soins ressemble souvent à un parcours du combattant. Seules 37% des structures sanitaires locales disposeraient des stocks nécessaires, selon un récent audit du ministère de la Santé.
Cette crise rappelle douloureusement l’épidémie de 2020 dans la même région, qui avait fait 31 morts. Un cycle infernal se répète : conflits armés → déplacements de population → promiscuité → conditions d’hygiène dégradées → résurgence de maladies. La paix reste le premier vaccin contre la peste en Ituri.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net