En République Démocratique du Congo, la méningite reste une épée de Damoclès au-dessus des têtes fragiles des enfants de moins de cinq ans. À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre cette infection, les experts rappellent une vérité trop souvent ignorée : dans ce combat sanitaire, les mères congolaises constituent la première ligne de défense. Le Dr Jean-Paul Mbuyi, pédiatre à Kinshasa, souligne avec force leur rôle pivot dans la prévention et le dépistage précoce de cette maladie redoutable.
Mais qu’est-ce qui rend la méningite si dangereuse pour nos enfants ? Imaginez une armée de bactéries attaquant les membranes protectrices du cerveau et de la moelle épinière. Cette invasion, si elle n’est pas stoppée à temps, peut transformer un simple épisode fébrile en tragédie familiale en moins de 24 heures. « La forme bactérienne représente une urgence vitale absolue », insiste le Dr Mbuyi. Les nourrissons, dont le système immunitaire ressemble à une forteresse en construction, paient le plus lourd tribut.
Dans ce contexte, les mères congolaises jouent un rôle comparable à celui de sentinelles. Ce sont elles qui, dans 78% des cas selon les données sanitaires, assurent le suivi vaccinal et détectent les premiers signaux d’alarme. « Une mère formée reconnaît mieux qu’un scanner les symptômes annonciateurs », image le pédiatre. Raideur de la nuque, fièvre rebelle, altération de la conscience : autant de signaux qui doivent déclencher une course contre la montre vers le centre de santé le plus proche.
Le Programme élargi de vaccination offre gratuitement le vaccin anti-méningococcique, véritable bouclier contre les formes les plus virulentes. Pourtant, un paradoxe persiste : comment expliquer que seulement 65% des enfants congolais bénéficient de cette protection vitale ? « L’accès géographique aux centres de santé et la désinformation constituent des obstacles majeurs », déplore le spécialiste. La solution ? Un binôme gagnant : rapprocher les services de vaccination des communautés et multiplier les campagnes d’éducation sanitaire en lingala et en français simplifié.
Au-delà de la vaccination, des gestes barrières accessibles à toutes font la différence. Se laver les mains avec du savon – un geste simple qui réduit de 40% les risques de transmission –, aérer quotidiennement les cases, éviter les surdensités dans les chambres… Autant de pratiques que les femmes peuvent impulser au sein de leurs foyers.
« Éduquer une mère, c’est vacciner toute une communauté », résume le Dr Mbuyi. Ce credo prend tout son sens quand on sait que 90% des décisions sanitaires pour les enfants reposent sur leurs épaules. Les initiatives ciblant spécifiquement les femmes – groupes de parole dans les marchés, spots radio en langues locales, implication des matrones – montrent déjà des résultats prometteurs dans les provinces pilotes.
En cette Journée mondiale, un message clair émerge des cliniques kinoises : renforcer les capacités d’action des mères, c’est donner un coup de frein à la méningite. Car derrière chaque enfant sauvé, il y a presque toujours une femme qui a su déceler l’urgence, braver les distances et défier les préjugés. La bataille contre ce fléau silencieux se gagnera donc dans les foyers avant de se jouer dans les hôpitaux.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd