Le grondement des moteurs à Butembo résonne désormais comme un glas. Dans cette ville du Nord-Kivu, la route est devenue un couloir de la mort où 170 vies se sont éteintes entre janvier et juin 2025. Des chiffres glaçants dévoilés par la Commission Nationale de Prévention Routière (CNPR) qui dressent un constat d’échec cuisant de la sécurité routière Nord-Kivu.
« C’est catastrophique », lâche Samuel Maliro, chef d’antenne de la CNPR Butembo, la voix nouée par l’émotion. Son témoignage nous plonge dans la réalité brutale de ces accidents routiers Butembo : « Nous avons environ 215 blessés graves et 170 morts. Et ce n’est qu’une partie visible de l’iceberg car notre ville est vaste. Des accidents échappent à tout recensement ».
Comment expliquer cette hécatombe qui dépasse les statistiques accidents RDC habituelles ? La réponse de la CNPR est sans appel : « L’ignorance du nouveau code de la route RDC reste la principale cause ». Un verdict qui balaie les justifications habituelles sur l’état des chaussées. « La majorité des drames surviennent sur des routes asphaltées, comme le boulevard Président de la République », précise Samuel Maliro, contredisant ceux qui imputent les accidents aux nids-de-poule.
La scène se répète tragiquement : des chauffeurs fonçant à 70 km/h en zone urbaine quand la loi impose 40 km/h, des piétons traversant sans regarder, des taximans défiant les feux rouges. « La route au lieu d’être une voie de développement est devenue une voie pour tuer », déplore le responsable de la CNPR, son amertume palpable. Chaque jour, des familles sont décimées, des commerçants perdent leurs moyens de subsistance, des enfants deviennent orphelins sur ces routes devenues des champs de bataille.
Le bilan humain cache une autre réalité : les centaines de blessés légers exclus des statistiques officielles. Ces survivants aux membres broyés, ces traumatisés crâniens condamnés à des vies brisées. Combien de drames silencieux derrière les 215 blessés graves comptabilisés ? La question hante les couloirs de l’hôpital général de Butembo où le personnel médical est submergé.
Face à l’urgence, la CNPR annonce une campagne massive de sensibilisation. « Chacun doit éduquer son prochain », insiste Samuel Maliro, appelant conducteurs et piétons à une prise de conscience collective. Mais suffira-t-il de formations pour enrayer l’hémorragie ? La réponse semble complexe dans une région où la culture de la transgression routière s’est enracinée.
Ces routes congolaises qui devraient relier les communautés et dynamiser l’économie deviennent des pièges mortels. À quand une politique nationale cohérente ? Derrière les 170 cercueils, c’est tout un système qui vacille – éducation défaillante, contrôle policier absent, infrastructures mal conçues. Butembo pleure ses morts aujourd’hui, mais sans action radicale, combien de villes congolaises suivront ce funeste chemin demain ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
