Les mains tremblantes serrant leurs précieux titres parcellaires, ils regardent, incrédules, les stands du nouveau marché de Bena Kabiya. Pour ces 500 ex-réfugiés congolais rapatriés d’Angola, la cérémonie de Tshilumba, dans le territoire de Kazumba au Kasaï Central, marque bien plus qu’une simple distribution de documents officiels. C’est la renaissance d’un ancrage sur leur terre natale, arrachée par les violences de la milice Kamuina Nsapu entre 2016 et 2017.
« Quand nous avons fui les machettes, nous avons tout perdu, jusqu’à l’espoir », murmure l’un des bénéficiaires sous le regard approbateur du gouverneur Joseph-Moïse Kambulu Nkonko. Présidant l’événement organisé en marge de la Journée mondiale du réfugié, il a souligné l’importance de cette initiative soutenue par le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) et les autorités provinciales. Comment reconstruire une vie après l’exil ? La réponse prend ici la forme concrète de parcelles viabilisées et d’un marché moderne.
Le programme de réintégration durable, piloté par la Fondation Kadima, va au-delà de l’urgence humanitaire. L’abbé Élie Mulomba, chargé de sa mise en œuvre, insiste sur la portée symbolique : « Ce marché est un lieu de paix et de collaboration. Quant au titre foncier, il rappelle à chaque bénéficiaire que l’État ne l’a pas oublié. » Une affirmation cruciale pour ces familles traumatisées par les conflits armés qui ont ensanglanté l’espace Kasaï.
Le Dr Jacques Dia Gondo, chef de la sous-délégation HCR dans la région, voit dans ce projet « le socle d’une nouvelle vie améliorée ». Les réfugiés rapatriés du Kasaï Central ont entamé leur retour progressif dès 2018, mais leur réinsertion socio-économique restait précaire. Les titres parcellaires à Tshilumba offrent désormais une sécurité juridique longtemps espérée, tandis que le marché moderne de Bena Kabiya crée un pôle économique vital.
Le gouverneur Kambulu promet que cette action n’est qu’un début : « Ce marché est une première étape, mais surtout un signal fort de notre engagement à bâtir un avenir stable et inclusif. » D’autres infrastructures sociales suivront, affirme-t-il, pour consolider cette réintégration des réfugiés rapatriés d’Angola.
Dans l’ombre des stands neufs, une femme caresse son titre foncier comme une relique. « Maintenant, je peux dire à mes enfants : cette terre est à nous », confie-t-elle. Ce geste administratif prend une résonance profonde dans une région meurtrie où la propriété foncière fut souvent source de conflits. Le programme du HCR au Kasaï Central montre ici toute son efficacité : transformer l’aide d’urgence en développement local pérenne.
Mais au-delà des pierres et des papiers, c’est un tissu social qui se répare. Le marché devient lieu d’échanges économiques mais aussi de dialogue entre communautés. Les autorités provinciales et le HCR ont-ils trouvé la clé d’une réintégration réussie ? Les mois à venir le diront, mais aujourd’hui à Tshilumba, 500 familles renouent avec la dignité d’exister sur leur propre sol.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
