La forêt congolaise étouffe sous le joug des trafiquants. Près de neuf mois après son précédent programme, l’African Wildlife Foundation (AWF) déclare la guerre à une vague criminelle déferlante qui saigne la biodiversité d’Afrique centrale. Le nouveau projet, lancé ce 20 juin à Kinshasa, cible simultanément le trafic de faune sauvage en RDC et le commerce illégal de bois précieux – un double fléau menaçant l’équilibre écologique régional.
« Lutte contre le trafic illégal de la faune sauvage, du bois et des autres ressources naturelles en RDC » : cet intitulé ne cache pas l’urgence. Les leçons du projet antérieur ont révélé des zones névralgiques, de l’aéroport de N’djili au port de Matadi. Mais aujourd’hui, un péril plus grand se profile avec le projet ferroviaire du corridor de Lobito. Cette artère économique, si elle n’est pas contrôlée, deviendra l’autoroute des trafiquants. Déjà, les postes-frontières tremblent face à cette menace imminente.
Comment briser les réseaux transfrontaliers ? La réponse tient en une alliance stratégique. Maître Joe Kassongo, Senior Legal Officer à AWF, détaille : « Notre collaboration avec l’INBAC angolais est vitale. Elle permettra de surveiller le corridor Lobito mais aussi les frontières de Lufu et Luau-Dilolo. » Une coopération inédite où agents congolais et angolais échangeront en temps réel des renseignements cruciaux. Trois ans – jusqu’en septembre 2027 – pour inverser la tendance.
Trois piliers structurent cette offensive contre la criminalité environnementale :
- Le renforcement des capacités dans les provinces sources (Tshuapa, Mongala), véritables épicentres du braconnage.
- L’amélioration de la chaîne judiciaire via l’Institut national de formation judiciaire (INAFORJ).
- La synergie transfrontalière avec l’Angola, clef pour démanteler les filières.
Antoine Tabu Senga, directeur pays d’AWF, alerte : « Le travail reste immense. Les écogardes de l’ICCN sont en première ligne, mais sans coordination régionale, nos efforts seront vains. »
L’offensive s’appuie sur un réseau d’ONG aguerries : Juriste pour l’environnement au Congo (JUREC) formera les magistrats, tandis que l’Observatoire de la gouvernance forestière (OGF) et Conserv Congo traqueront le trafic de bois en Afrique centrale. Même le Conseil supérieur de la magistrature est mobilisé pour identifier les juges impliqués. Un front uni financé par le Bureau américain INL, preuve que la communauté internationale guette cette bataille.
La nature saignée par les trafics exige plus que des discours. Alors que le projet AWF Congo se déploie, une question brûle les lèvres : l’Afrique centrale parviendra-t-elle à sauver ses trésors vivants avant qu’ils ne deviennent souvenirs ? La réponse se joue aujourd’hui aux frontières de l’espoir et de l’extinction.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: Actualite.cd
