L’image insoutenable de moustiquaires imprégnées utilisées comme filets de récupération des corps résume le drame qui se joue depuis juin autour du lac Tumba. Christophe Yoka, coordonnateur du Panel des experts de la société civile de l’Équateur, la voix nouée d’indignation, décrit une gestion fonds victimes naufrage entourée d’opacité : “Comment expliquer aux familles que les moyens destinés à leur soulagement semblent s’évaporer dans des circuits obscurs ?”
Quatre mois après le naufrage ayant coûté la vie à une cinquantaine de personnes dans le territoire de lac Tumba Bikoro, la colère gronde. Les équipements de sauvetage élémentaires faisaient défaut, contraignant les sauveteurs à des expédients macabres. “L’absence de dispositif d’urgence local a transformé une tragédie en catastrophe humanitaire”, déplore Yoka, pointant du doigt les autorités provinciales. La société civile Equateur exige aujourd’hui un audit transparent des fonds alloués par Kinshasa et les partenaires internationaux.
Plus glaçant encore : la suspension recherches disparus sans justification officielle. Des dizaines de familles errent quotidiennement sur les rives, scrutant les eaux sombres du lac à la recherche d’un indice, d’un reste de vêtement. “Mes deux neveux sont dans ce lac depuis 127 jours. Qui donne l’ordre d’arrêter les recherches ?” s’interroge Mbonga Bolinga, pêcheur à Mbandaka. Les autorités locales, sollicitées par Radio Okapi, sont restées muettes. L’administrateur du territoire Justin Mputu, injoignable, symbolise ce mur de silence.
Le calvaire des survivants ajoute une couche d’abandon à ce tableau désolant. Aucun soutien survivants RDC psychologique ou médical n’a été déployé pour ceux qui ont vu la mort de près. “Nous avons survécu à l’eau, mais nous mourons de faim et de détresse”, témoigne Kapinga Nsombi, rescapée hébergée dans un hangar délabré. Les promesses d’aide socio-économique se sont envolées comme la brume matinale sur le lac.
Cette affaire dépasse le simple fait divers tragique. Elle révèle les failles béantes de notre gestion des catastrophes et l’urgence de réformer les mécanismes d’intervention. Quand l’État délègue sa responsabilité humanitaire sans contrôle, quand la transparence devient optionnelle, c’est le contrat social entier qui se fissure. Le lac Tumba, miroir des âmes, reflète aujourd’hui l’image d’une nation qui laisse ses enfants sombrer deux fois : dans les eaux et dans l’oubli.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
