Le bulldozer de l’ordre urbanistique s’abat sans concession sur la Baie de Ngaliema. Ce samedi 7 juin, Kinshasa a engagé une bataille frontale contre le béton sauvage qui étrangle le fleuve Congo, lançant une opération-choc de démolition des constructions anarchiques. Sous l’œil vigilant du ministre provincial de l’Environnement, les pelleteuses ont entamé leur travail chirurgical dans ce secteur stratégique, marquant un tournant décisif dans la campagne « Retour à la norme ».
Dans un rayon implacable de 100 mètres, toutes les habitations érigées dans le lit du fleuve sont vouées à disparaître. Cette mesure radicale répond à une urgence double : libérer d’urgence les espaces publics illégalement accaparés et briser le cycle infernal des inondations qui transforment régulièrement la capitale en paysage aquatique. Le fleuve Congo, artère vitale étouffée par le béton parasite, reprendra-t-il enfin son souffle ?
L’opération à la Baie de Ngaliema n’est pas un coup d’épée dans l’eau. Elle s’inscrit dans une stratégie globale de résilience face aux colères climatiques. Après le curage des rivières et caniveaux, ce nouveau front ouvre la guerre contre l’urbanisation sauvage qui gangrène Kinshasa. Les constructions anarchiques sur les berges, véritables bombes à retardement écologiques, ont montré leur dangerosité lors des dernières saisons des pluies où des quartiers entiers ont sombré sous les eaux.
Cette offensive marque un changement de braquet dans la gouvernance urbaine. Le gouvernement provincial passe de la parole aux actes en s’attaquant frontalement à des zones sensibles, longtemps laissées à la loi du plus fort immobilier. La Baie de Ngaliema, joyau naturel défiguré, devient ainsi le symbole de cette reconquête territoriale. Mais jusqu’où ira cette opération retour à la norme ? Pourra-t-elle endiguer la marée montante de l’habitat informel ?
Les conséquences de l’urbanisation sauvage au Congo sont chiffrées en vies humaines et en dégâts économiques. Chaque année, les inondations à Kinshasa font des centaines de sans-abri et paralysent des axes vitaux. En rétablissant la zone tampon naturelle, les autorités espèrent recréer cette barrière écologique cruciale qui absorbe les crues du majestueux fleuve Congo. Une question de survie urbaine dans un contexte de dérèglement climatique accru.
Derrière les gravats des constructions illégales se profile un défi colossal : la prévention inondations en RDC exige plus qu’une réponse ponctuelle. Elle nécessite une refonte totale de la planification urbaine et un combat sans merci contre la corruption foncière. L’opération de ce samedi ouvre une brèche dans le mur de l’impunité immobilière, mais la route reste longue pour assainir durablement les berges du fleuve.
La Baie de Ngaliema, aujourd’hui théâtre de démolitions contrôlées, pourrait devenir le laboratoire d’une nouvelle cohabitation entre Kinshasa et son fleuve. Si l’opération « retour à la norme » tient ses promesses, elle écrira un chapitre crucial dans la lutte contre les constructions anarchiques à Kinshasa. Le compte à rebours est lancé : le fleuve reprend ses droits, l’urbanisation sauvage au Congo vit ses dernières heures. Reste à savoir si cette thérapie de choc préservera la capitale congolaise des prochaines colères du ciel.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: Actualite.cd
