Dans la chaleur du stade de la Concorde, ce 6 juin 2025, la célébration de la Tabaski – la « fête des moutons » – a pris une résonance politique inattendue. Des milliers de fidèles musulmans du Sud-Kivu ont transformé ce moment religieux en tribune citoyenne, lançant un cri d’alarme pour l’avenir de l’Est congolais. « Nous demandons aux autorités politiques de s’unir tous sur une même table pour trouver une paix durable », a déclaré d’une voix vibrante Cheikh Saïdi Kibafe du conseil théologal du Sud-Kivu Iman, son message résonnant comme un électrochoc parmi l’assistance. « Appelons toutes les autorités à un dialogue inclusif sans mettre les autres à l’écart ».
Cet appel musulmans Sud-Kivu, lancé lors des prières solennelles, dépasse le simple vœu pieux. Il traduit l’exaspération croissante des communautés face à l’enlisement sécuritaire dans les provinces orientales. Les fidèles, venus célébrer la Tabaski 2025 RDC dans un élan de dévotion, ont insisté avec une gravité inhabituelle : la restauration de l’autorité de l’État et la paix Est Congo ne pourront advenir sans une concertation réelle incluant tous les décideurs, sans exclusive ni calcul partisan. Quel avenir attend les enfants du Kivu si les divisions persistent ?
La demande de dialogue inclusif RDC prend racine dans un constat amer : des années de conflits ont érodé le tissu social, faisant de la cohésion sociale Sud-Kivu un mirage lointain. Autour du stade, les témoignages se recoupent. « Quand nos dirigeants se déchirent, ce sont nos familles qui paient le prix en déplacés et en vies perdues », confie Mama Aisha, commerçante de Bukavu, les yeux rivés sur l’estrade. Un jeune étudiant ajoute, amer : « Ils parlent de paix dans les hôtels climatisés pendant que nous, on compte les morts ». Cette célébration religieuse s’est ainsi muée en plébiscite populaire pour une refondation politique.
Les autorités provinciales présentes, interpellées par cette mobilisation inédite, ont tenté de renvoyer la balle. Dans leur discours officiel, elles ont enjoint… les musulmans eux-mêmes à « favoriser le dialogue et l’unité ». Un retournement qui n’a pas manqué de susciter des murmures dans la foule. Pourtant, le message central demeure : sans inclusion réelle de toutes les sensibilités politiques et sociales, toute tentative de pacification restera vaine. Comment reconstruire la confiance quand des pans entiers de la société se sentent marginalisés ?
La demande insistante d’harmonie entre les différents groupes musulmans locaux révèle une dimension cruciale. Dans un Sud-Kivu marqué par des clivages ethniques et religieux instrumentalisés, cette autocritique communautaire est un signal fort. Elle reconnaît que la paix durable passe d’abord par une réconciliation interne avant de prétendre à l’unité nationale. Les fidèles le savent bien : aucune autorité étatique ne tiendra debout sur un terreau social fracturé.
Cet événement religieux transformé en forum citoyen pose une question fondamentale : les dirigeants congolais sauront-ils entendre cet appel venu des mosquées et des cœurs meurtris du Kivu ? Alors que la région continue de s’enfoncer dans la violence, l’exigence de cohésion sociale portée par les musulmans lors de la Tabaski pourrait bien être la dernière chance d’éviter l’effondrement. L’Est congolais attend plus que des promesses : il exige des actes concrets pour une paix construite par et pour tous ses enfants.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
